Mitraillette Kelly. Machine-Gun Corman. Susan Cabot, Charles Bronson. 8/10

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Le titre américain Machine-Gun Kelly, sonne mieux à nos oreilles.

Mince alors ! Dommage pour les loupés, ils sont passés à ça d’un grand film !

Ce film tourné en un peu plus d’une semaine à peine, par le très efficace Roger Corman, montre une prenante tension dramatique, doublée d’une belle lisibilité.

Il est globalement bien conçu, mais il est plombé par quelques problèmes de vraisemblance scénaristique. C’est le versant psychologique qui connaît des ratés. Nos créateurs, qui se veulent inspirés par des faits réels du banditisme sauvage des années 30, auraient du mieux se renseigner en amont. Ça n’a l’air de rien, mais si on vise les hautes cimes du cinéma, on se doit de faire un sans-faute.

Pourquoi avoir voulu nous infliger cette histoire-bis de puma instrumentalisé ? Comment croire que cet animal excité par Kelly/Bronson, parvient à agripper le bras d’un de ses sbires désobéissant, au point qu’on doive l’amputer ? Et que quelques plans après, le mutilé se balade comme si de rien n’était. On se croirait retombé dans un obscur nanar.

Et puis cette phobie des cercueils, du même Kelly/Bronson, n’est pas crédible pour un sous. Voilà un gaillard qui terrorise tout le monde, qui est l’archétype du mâle brutal psychopathe, et qui se transforme en lavette timorée pour le moindre symbole de mort qu’on lui met sous les yeux. C’est aussi grotesque que l’éléphant qui craint une souris.

La belle Susan Cabot connaît un revirement de caractère un peu trop abrupt, pour être crédible. Elle passe de femme du maître, un brin rebelle mais somme toute obéissante et périphérique, à maîtresse femme manipulatrice qui serait au centre du complot, en moins de temps qu’il ne faut pour le dire.

Cela dit Charles Bronson est remarquable dans ce biopic sur George R. Kelly. Il nous fait un bandit dictatorial qui ne supporte aucune contrariété. Son obstination hallucinante est soutenue par une rare violence. On peut dire qu’en quelque sorte, lui voit the whole picture. Et qu’il agit en conséquence. Cela se tient.

Susan Cabot, sa compagne et comparse, tient parfaitement son rôle également. On ne voit pas venir ce petit brin de femme et Charles Bronson ira à la niche lorsqu’elle haussera le ton. Il va se faire traiter comme un moins que rien. Et on aura de belles surprises. L’émancipation n’a pas attendu nos pitoyables Sandrine Rousseau. Une femme de tête a toujours su se faire entendre et respecter.

Il y a de belles scènes et ce qu’il faut d’indécision et de non-détermination, pour que le récit nous entraîne. C’est assez rare pour qu’on le signale. Le caïd au talon d’Achille a effectivement touché à tout, dont le kidnapping de l’enfant unique du tycoon Charles Urschel. Dans un premier temps, il a habilement empoché les 200 000 $ ( (4,2 millions de dollars aujourd’hui). A ce moment, il n’avait pas tout faux. Mais le plan venait de Catherine Kelly ( Kathryn Thorne) et George Kelly Barnes « Kelly » son mari. Catherine avait déjà une « bonne » réputation dans le crime avant d’avoir rencontré son futur époux « mitraillette ».

Sa compagne a écopé comme lui de la prison à vie. Elle est sortie après 11 ans de taule, lui est resté bien plus longtemps et a fini par y mourir. Comme il avait tendance à faire le Marseillais, on la surnommé « pistolet à bouchon Kelly ». Le dégonflé « Pop Gun Kelly » en pourrissant à Alcatraz s’en est beaucoup mieux tiré. Preuve que la belle avait une longueur cérébrale d’avance.

La Mitraillette voudrait symboliser la virilité perdue du puissant Bronson. Mais l’outil phallique tient plutôt du gadget pour gamin ici, et on perd vite de vue ce fil psychanalytique. Dans ce film, la postérité retiendra surtout cette image d’un Bronson inaltérable, avec son côté monolithe cyclopéen.

La partie « fillette qui part en sucette », n’a donc guère d’importance. Elle est vite oubliée. CQFD. D’ailleurs le fait qu’il se soit rendu sans arme, une fois la situation totalement compromise, n’est pas un signe de débilité. Pourquoi aurait-il fallu qu’il se sacrifiât ?

Le long métrage tait le fait que notre mastard a démarré des études universitaires. Un bon film sur les entrailles et la cervelle du gredin rusé, reste à faire. Et sans doute qu’il faudrait réaliser aussi quelque chose sur Kathryn Thorne, sa femme agissante, qui l’a entraîné au maniement des armes.

L’enquête permettant de remonter jusqu’aux kidnappeurs est une pièce d’anthologie, qui n’est pas si bien développée que cela dans ce scénario. Il y aurait là également un travail à reprendre, permettant un autre bon film.

Ce n’est pas de leur faute si le scénario pèche par moment. Ils ont voulu aller trop vite, ce qui les maintient quand même dans les approximations des séries B. D’ailleurs le metteur en scène Roger Corman est reconnu comme un « maître »… de la série B. Ce qui tient du paradoxe, puisque le terme série B signifie absence de maîtrise et petits tâcherons du cinéma.

Le film, qui a du plomb dans l’aile, ne mérite pas vraiment ma note de 8/10. Mais il développe une indéniable originalité dans cette morne plaine des thrillers, d’où mon indulgence coupable. Et puis il n’est pas pour rien dans la légende iconique de Bronson. Lequel est singulièrement mobile dans sa façon de faire et ses expressions.

Mea culpa, mais pas tellement…

https://fr.wikipedia.org/wiki/Machine_Gun_Kelly

https://en.wikipedia.org/wiki/Machine_Gun_Kelly

https://fr.wikipedia.org/wiki/Mitraillette_Kelly

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