Avis. Armée 12 singes. Bruce Willis + Terry Gilliam – Résumé. (1995) 5/10

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Ce titre me faisait penser à tous les douze machins et sept trucs du genre. J’évitais. Je craignais une énième déclinaison sur « Les 12 salopards », « Les 7(+5) mercenaires » etc.

J’avais tout faux ! Ce n’est pas un de ces films d’action sur une bande de repris de justice, à qui on donnerait une dernière chance…

  • Quoique ! C’est le cas ici quand même, mais juste pour le personnage central, cet ex-taulard isolé. Et un autre sans grande importance. Ils ne forment pas un groupe. Chacun va de son côté.

Ce film est en fait une fantaisie et fugue, sur des voyages dans le temps. Ces expéditions se révèlent très terre à terre. C’est de l’utilitaire. Il s’agit d’aller revoir le passé afin d’éviter cette pandémie virale ultra meurtrière de 2035.

  • Du genre : je suis au moment de l’acmé d’un hyper-covid-19, et si je remontais en arrière pour empêcher le patient 0 ?

Le problème, c’est qu’il n’y a pas qu’un seul aller retour rétro-antérograde. Il y en a plusieurs et ils vont un peu partout. Et donc, la question qui se pose en permanence est : où est donc le présent ?

Problématique parfaitement légitime, non seulement pour ce héros qui s’interroge, mais aussi pour nous les spectateurs. On est en effet transbahuté dans au moins quatre époques différentes, avec parfois peu de repères et de cohérence. Cela fait un peu brouillon d’inculture.

De plus la réalisation évite les questions qui fâchent.

  • Ceux qui se déplacent dans le temps sont-ils juxtaposés avec leur soi-même du passé ?
  • Ou bien, il y a-t-il un effacement du futur au fur et à mesure où se réécrit le présent revisité, avec cette fois un seul personnage en tout et pour tout, à chaque moment ?
  • On sait que les paradoxes engendrés par l’une ou l’autre perspective, sont de toute façon rédhibitoires. Autant les contourner pudiquement.
  • Il y a cependant un petit penchant pour le schéma avec le voyageur dans le temps qui reste unique.
  • Mais le fait que la mémoire de certains semblent garder des souvenirs de passages décalés, et pour le time-trotter et pour les immobiles, pourrait remettre cela en cause. En plus on nous en met une couche sur le « déjà-vu ». On mélange tous les concepts assurément.
  • Bruce Willis dans les tranchées pendant la guerre de 14-18, en 1990, en 1996, ou bien 2035, semble toujours avoir le même âge (cela n’est logique que dans les contraintes du casting). Difficile d’imaginer qu’on puisse ainsi effacer quoi que ce soit. Croyez moi, cela devient un tâche impossible. Il y aura forcément des Bruce Willis concomitants, entraînant des modifications irréversibles, et qui auront des âges bien différents à un moment T. Ce n’est pas le petit battement d’aile du papillon et ses lourdes conséquences. Non c’est ici plusieurs déflagrations immenses qui sont susceptibles d’endommager gravement le tissu spatio-temporel. Rien que cela ! Pourtant, la vie suit tranquillement son cours. Mouais.
  • Vous préférez l’aspirine ou le doliprane ?

Pas grave ! Il n’y a pas mort d’homme, c’est juste du cinéma.

Dans cette histoire, il s’agit donc pour le héros, envoyé en mission par d’étranges savants du futur, d’essayer de trouver les sources de la contamination dans le passé et de comprendre le rôle joué par une organisation clé, « L’armée des 12 singes ».

A ceci s’associe une violence chaotique et du mouvement désordonné. L’un et l’autre me semblent assez inutiles, Mais on ne fait pas de bons scénarios avec juste de bons sentiments et le temps qui passe. En tout cas, le pensait-on à l’époque.

Et comme on ne sait pas très bien sur quel pied danser dans cette histoire temporelle, on rajoute une problématique de folie. C’est le syndrome David Vincent (celui qu’on ne croit jamais quand il raconte qu’il y a des Envahisseurs, des Aliens… alors que c’est pourtant vrai ! Hum !).

Dans les années 90, on avait encore une vision caricaturale et auto-entretenue, de ce qu’on pensait être la folie. Le pauvre Brad Pitt nous fait une interprétation très dans l’air du temps. Il s’agit d’un passage maniaque (dans sa conception médicale), avec cerise sur le gâteau, son œil gauche tout bizarre (du scotch sur la paupière?). De quoi faire se tordre de rire, même un étudiant en médecin de première année.

  • Le respect à la lettre de ces conventions absurdes lui a valu un Golden Globes de Meilleur acteur dans un second rôle.
  • Il faudrait créer un Oscar du réalisme paradoxal (c’est contre-intuitif de le jouer ainsi, mais c’est vraiment comme cela qu’il faut faire), ou un contre-Oscar du ce qu’on croit être le jouer vrai, mais ne l’est pas (le meilleur plantage). L’un ou l’autre serait jugé par un panel de vrais experts.

Les fous qui accompagnent Bradounet, avec leurs tics de cinéma sont tout aussi « bizarres ». On est dans un projection d’un monde psy d’avant les médicaments efficaces. L’asile qui est montré ici peut en effet rendre « fou ». Il faut dire qu’il a été tourné dans un pénitencier en ruine.

Et que dire du rôle de psychiatre de Madeleine Stowe. Cette femme sérieuse mais qui finit par être ébranlée dans ses convictions professionnelles élémentaires. Ce jeu du qui est fou, qui ne l’est pas, ou le plus fou n’est pas celui qu’on pense, est typique des présupposés de l’anti-psychiatrie mal comprise de cette époque.

Au total, même en jetant un voile pudique sur les curieux partis pris spatio-temporels, je trouve le film trop alambiqué et finalement pas très bien réalisé.

Il ne faut pas confondre complexité inutile avec de l’intelligence. Ce qui se conçoit bien, s’énonce clairement disait notre bon Boileau. Le compte n’y est pas. Je suis loin de crier au génie… comme d’autres l’ont fait.

Terry Gilliam semble parfois perdu et glisse à plusieurs reprises dans ses mauvais penchants. Il aime mettre mal à l’aise, mais sans toutefois oser y aller à fond comme le ferait un Lars von Trier. Il nous refait aussi le coup de ses machines déprimantes et de ces aréopages de dominants extravagants (Brazil 1985)

Les légendaires Bruce Willis et Terry Gilliam sont loin d’être incontournables. Brad Pitt est ici en touriste, il sera donc épargné.

https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Arm%C3%A9e_des_douze_singes

Bruce Willis
Madeleine Stowe
Brad Pitt
Christopher Plummer
David Morse

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