Avis. Blind Date – Rosamund Pike violée, me-too vengeance – Résumé. (2015) 7/10

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De bons acteurs et une réalisation soignée donnent facilement le change. Rares sont les films qui font dans la finesse avec un tel sujet : le viol. (Return to Sender) (Le Mal en elle)

La polysémie du titre Le Mal en elle colle parfaitement au film (*). Mais outre la question du viol qu’il recouvre, il y a là un sens caché très différent.

Cette ambivalence, déclinée de façon assez brutale, est d’ailleurs un peu le problème de cette œuvre.

En voici les deux oppositions principales :

– Le viol qu’a enduré l’héroïne, en faisant un mauvais jeu de mot, a mis le mâle en elle et surtout un Mal profonden elle.

Les hommes ne se rendent pas compte. Tout au plus peuvent-ils faire une analogie avec ces viols masculins qu’on dit avoir lieu en prison et qui s’accompagnent d’un profond déclassement, d’une déchéance. C’est sous cet angle qu’on le voit habituellement, la douleur morale l’emportant sur le physique.

Quant au viol de femme, on devrait pouvoir se fier à l’excellente prestation d’actrice de Rosamund Pike qui réussit l’exploit de nous restituer un large spectre de ce qui accable les victimes, pendant et après :

  • Le viol au sens propre et figuré, la violence réelle, le syndrome post traumatique, la difficulté de la réparation, les angoisses permanentes, dont celle de l’idée que cela pourrait se reproduire.

Cela étant, j’imagine que toute personne violée doit avoir ses blessures personnelles.

– Le Mal en elle peut signifier également qu’elle a un mal en elle qui précéderait sa terrible expérience et qui s’amplifierait dans ces circonstances.

Et en effet le scénario montre un point de rupture entre ces deux versions.

– D’abord l’attachante personnalité de cette dévouée infirmière, est littéralement massacrée par le viol.

– Passé la phase la plus critique, elle décide de procéder à un itinéraire de reconstruction bien à elle.

Cela consiste à se rapprocher de l’agresseur qui est en prison, en le visitant régulièrement. Une démarche que l’on peut interpréter comme une sorte de parcours de ré-humanisation du violeur, voire une réhabilitation. En tout cela semble correspondre à une certaine neutralisation des affects qui la rongent.

Elle entame une curieuse cour, comme un dompteur qui prend trop de risques. Elle ira même jusqu’à lui faire faire des travaux chez elle, dès sa sortie conditionnelle. Ce qui équivaut à une réparation au sens premier.

Cette voie lui permettrait-elle de ne plus avoir peur de lui et de se débarrasser de ses angoisses ? Le spectateur hésite alors. Une folie ? Un syndrome de Stockholm ? Un sentiment chrétien du pardon ? Un cheminement thérapeutique original ?

– Mais l’explication du long-métrage est tout autre. Et ce passage violent à un certain irréalisme peut dérouter. Pas question ici de vendre la mèche.

– – –

Rosamund Pike diplômée de l’université d’Oxford, transpire l’intelligence par tous les pores de sa peau. Ces yeux nous en racontent des histoires. En bonne Anglaise, elle s’ingénie à masquer ses capacités supérieures, ce qui lui donne encore plus de majesté.

Lacérer à l’écran une telle icône fait paraître le crime encore plus révoltant (mais bien sûr il ne doit pas y avoir de compétition victimaire, on parle ici d’images).

Par contre les talents intellectuels de l’artiste sont en contradiction avec la conclusion revancharde du film. Mais ça c’est une autre histoire.

Plus anecdotique est sa capacité à interpréter une toute autre face de son personnage, rien qu’en changeant de vêtements, coiffure et mimique. C’est bluffant ! Mais nous autres les hommes sommes de grands niais face à ce genre de déferlantes.

  • Maquillage, vérité et mensonge, c’est tout un sujet. Surtout si l’on adopte cette sentence de Picasso, que j’ai infléchie ici « L’art [du maquillage] est un mensonge qui dit la vérité ».

Elle serait également une brillante violoncelliste… ce qui n’a rien à voir avec le film, mais montre bien qu’on n’a pas à faire à du tout venant.

Nick Nolte, en vieux père inquiet de la victime, est excellent également.

Shiloh Fernandez incarne le violeur. C’est pourtant à la ville un beau garçon, qui ne doit pas avoir trop de problèmes pour séduire ces dames. Il n’a donc pas trop le physique qu’on imagine dans cet « emploi ». Il s’acquitte de la lourde tâche de montrer une certaine imprévisibilité. Ce qui fait que le jeu du chat et de la souris (mais qui est qui ?) avec Rosamund Pike est assez prenant.

(*) Return to Sender est un titre trop explicite. Je me garderais bien de le traduire.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Mal_en_elle

Rosamund Pike
Shiloh Fernandez
Nick Nolte

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