J’ai un problème avec Orson Welles. (Black Magic)
Voilà un acteur-réalisateur qui a l’air intelligent, et qui l’est sans doute, au moins un peu plus que la moyenne des réalisateurs. Et pourtant, il semble enfermé pour toujours dans un jeu théâtral, prétentieux et cabot. Il nous fait, presque à chaque fois, une sorte de parodie des acteurs shakespeariens, l’humour en moins. On a l’impression qu’il est comme cela à la ville, comme devant les caméras. Et ses scénarios semblent conçus uniquement pour le mettre en scène et flatter son égo. Et là il en vient à massacrer la complexité d’un personnage mythique, Cagliostro.
Il campe avec beaucoup trop d’emphase une sorte de mi-visionnaire, mi-mage, mi-charlatan, mi-fier bretteur. Oui je sais que cela fait beaucoup de mi pour un seul cocktail. Mais c’est tout lui, ce ça qui déborde. Ce qui fait qu’on a du mal à le positionner entre le charlot et le chercheur.
L’histoire est basée sur le Joseph Balsamo d’Alexander Dumas. Le nom de l’auteur est écrit comme cela, à l’américaine, sur une grande plaque sur sa porte. Le principal de l’action se déroule dans un Paris très mal reconstitué, fait de toiles peintes. Ça peut faire rire les francophones. Surtout quand en plus on se farcit tout le film en VO.
Et puis il y a tous ces clichés sur Marie-Antoinette (Nancy Guild), Louis XV, Louis XVI, la Du Barry (Margot Grahame) etc. Et il rajoute un De Montaigne (Stephen Bekassy) dont le nom fait bien français vu outre atlantique. A noter que l’essentiel Cardinal de Rohan et quelques autres, disparaissent à la trappe.
Le trait est constamment grossi. On est dans la même outrance, que ce soit pour évoquer l’enfance terrible du héros, sa rencontre avec le médecin hypnotiseur Mesmer, son ascension, ou sa perte. Son immense carrière est réduite à quelques anecdotes.
Le coup du sosie parfait de la reine est vraiment le genre de ficelle facile à exploiter au cinéma. Ça ne coûte pas cher en actrice, vu que c’est la même. Cela engendre toujours les mêmes genres de rebondissements. Ce qui donne sérieusement envie de bailler. Nancy Guild est particulièrement fadasse et inefficace. Elle n’a pas laissé de grandes traces au cinéma.
La fameuse histoire du collier est transposée et le réalisateur se prend un peu les pieds dans les tapis brodés.
Welles nous refait le coup du procès en long et en large. C’est à dire qu’il s’octroie une tribune d’acteur exhibitionniste et mythomane, face au monde. Rien que cela !
C’est brouillon, confus, déséquilibré, saugrenu, superficiel et peu efficace. Et Orson n’est pas si génial que le pensent certains critiques, qui sont vite éblouis par la supercherie et l’expressionnisme excessif.
Cagliostro n’est pas un illuminé qui aurait des fulgurances intéressantes, non c’est un escroc classique mais doté d’une grande habilité et d’un savant opportunisme. Il aurait fallu comprendre les ressorts de son succès, avec une vraie analyse. Et sa vie est bien plus passionnante que cette simplification mièvre.
Le prétendu « génial » Orson Welles n’a pas su tirer quelque chose de valable de toute cette problématique complexe. Il est donc lui aussi un illusionniste et un imposteur. D’ailleurs il n’est jamais meilleur que quand il joue les salauds répugnants (La Soif du mal 1958).
A oublier ici.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Cagliostro_(film,_1949)
- Orson Welles : Cagliostro
- Nancy Guild : Marie-Antoinette
- Akim Tamiroff
- Frank Latimore
- Valentina Cortese
- Margot Grahame : Madame du Barry
- Stephen Bekassy
- Berry Kroeger : Alexandre Dumas
- Gregory Gaye :
- Raymond Burr : Alexandre Dumas fils
- Charles Goldner : Docteur Mesmer
- Lee Kresel : Louis XVI
- Robert Atkins : Louis XV