Avis. Everybody’s Fine. De Niro – Résumé. (2010) 7/10

Temps de lecture : 3 minutes

Que du beau monde au service d’un scénario clair, précis et sincère, bien d’idéologiquement discutable.

Robert De Niro est un veuf retraité qui s’ennuie. Il demande à ses 4 grands enfants de venir un week-end. Mais aucun ne vient, tous ont de bonnes excuses.

Il est déçu. Malgré sa santé précaire, il entreprend donc d’aller les voir un à un, dans les villes lointaines où ils habitent.


Et bien qu’ils proclament tous que tout va bien (everybody’s fine), il va découvrir progressivement que chacun a des difficultés et des blessures. Mais ceci nécessitera à chaque fois un décodage, comme s’il s’agissait de petites énigmes, tant ses enfants ne veulent pas l’affronter directement et/ou lui faire de la peine. Le procédé est habile car il associe le spectateur.

– On ne verra pas beaucoup l’acteur Austin Lysy, chargé d’incarner un fils artiste-peintre déjanté. Une sorte de Basquiat maladroit. Et pour cause il est en train de mourir d’une overdose. Ses frères et sœurs feront tout pour cacher la vérité au père.

– La belle jeune femme, qui est interprétée Kate Beckinsale, a réussi dans la pub. Mais De Niro n’a pas de mal à voir qu’au delà de la façade, la famille de sa fille est dysfonctionnelle. Mais là encore tout est fait pour lui masquer la vérité.

– Sam Rockwell nous fait un petit percussionniste d’orchestre classique, alors que son paternel le pensait chef d’orchestre à la renommée internationale. Leur conversation les rapprochera au-delà du gap initial. Mais De Niro a du mal à avaler que ce précieux fils se contente d’une vie si peu ambitieuse. « Il n’est pas trop tard » lui dit-il. « Papa, je gagne ma vie et je suis heureux comme cela ».

– Drew Barrymore vit à Las Vegas. Et là encore, il y a un gouffre entre sa supposée flamboyante carrière de danseuse et la réalité de son modeste rôle. Sans compter l’enfant dont elle cache l’existence et ce qui semble son homosexualité honteuse. Son sourire contraint cache mal sa vie peu glorieuse.

La dernière énigme à résoudre c’est le père qui nous la propose. Qu’y a-t-il dans ces enveloppes qu’il dépose à chacun de ses enfants.

De Niro est au sommet de son art. Ses interactions avec tous ces comédiens de haut niveau valent à elles seules le détour (c’est une des justifications du 7/10).

L’image est soignée. Tout cela est bien fait.

Ce qui l’est un peu moins, c’est le poids que l’on cherche à faire porter au père. La thèse est claire et répétée. Il aurait été trop exigeant, trop directif. D’où tous les maux qui accablent sa progéniture. En fait on lui reproche de ne pas avoir été un papa poule, une sorte de mère bis. Alors qu’on ne questionne jamais la défunte. Elle, elle comprenait. Elle, elle était indulgente. Comme si l’éducation devait se contenter de ce laisser aller.

Jadis on versait dans le tout psychanalytique ou le tout politique. Il semble à présent qu’on verse dans le tout socio-psychologique.

La « Faute » c’est la pression sociale qui pousse à la réussite à tout prix. Et ici ce facteur se combine avec une sorte d’esprit de revanche d’un père qui n’a pas si bien réussi. Ses enfants devraient achever ce qu’il a commencé. Il a passé sa vie à enduire de PVC des câbles téléphoniques. Il a même grillé ses poumons avec cela. Il faut donc que tous ses efforts n’aient pas été inutiles et qu’ils permettent de mener ses enfants un cran plus haut.

Cette critique de l’effort présuppose pas mal de choses discutables :

  • D’abord que la réussite professionnelle ne compte pas tant que cela.
  • Et que l’idée d’une destinée familiale, où chacun se hisserait sur les épaules de l’autre, est pernicieuse.
  • Et qu’il n’existe pas un pôle paternel plus spécifique, sans doute plus dur, et qui pousse l’enfant à prendre des risques et à se dépasser.
  • Et qu’il n’y a pas une insatisfaction fondamentale de l’être humain qui l’entraîne à aller plus loin.
  • Et que l’on n’apprend pas des coups portés.
  • Et que ce qui nous tue pas ne nous rend pas plus fort (Nietzsche).
  • Et que l’être humain est une page blanche, sans déterminant personnel.

On a clairement viré à gauche et dans le relativisme.

Et De Niro fera son mea culpa. « Oui j’ai été trop exigeant. Mais désormais je lâche prise et seul compte le fait que mes enfants soient heureux ». C’est céder à un diktat consumériste. Gavez vous le reste ne compte pas. Ne travaillez pas, ne prenez pas de la peine, et on a ce qu’il faut, on s’en fout du fond (D’après La Fontaine).


L’histoire se termine à l’américaine. C’est à dire avec une apothéose de Noël où tout le troupeau meurtri sera réuni dans le pardon (sauf le défunt David). Sous le toit du patriarche on s’empiffre joyeusement de Dinde Les valeurs familiales sont donc préservées. Hallelujah !

https://fr.wikipedia.org/wiki/Everybody%27s_Fine

Robert De Niro
Drew Barrymore
Kate Beckinsale
Sam Rockwell
Katherine Moennig

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