Comme un torrent (Some Came Running) (1958) 5/10 Sinatra

Temps de lecture : 4 minutes

Ce film est une sorte de thriller sentimentalo-sociéto-familial.

Le scénario est construit sur la base d’enchaînements convenus et prévisibles, bien que souvent peu crédibles. Cet apparent paradoxe résulte de l’utilisation de codes cinématographiques, largement utilisés dans les réalisations de cette époque.

Frank Sinatra nous fait un frère rebelle, qui revient presque par hasard, dans la petite ville de son enfance. Bien qu’il soit plutôt cool et détaché, il a quand même un contentieux avec son grand frère. Ce dernier, incarné par Arthur Kennedy, était le soutien de famille, mais il s’est débarrassé du cadet en le mettant en pension naguère. C’est largement pardonné, mais quand même.

L’aîné est lui bien inséré dans sa petite société. Il a réussi au sens classique du terme. Pourtant il n’est pas heureux. Au delà du nécessaire maintien des apparences, on se rend vite compte que cette famille est dysfonctionnelle. Sa femme ne l’aime plus depuis longtemps et réciproquement. Leur fille ne songe qu’à quitter cette bourgade étouffante. Ce chef de famille vit mal cette illusion de paisible vie bourgeoise. Au fond de lui-même, il aspire à autre chose. Il va se laisser tenter par une relation avec sa jeune secrétaire.

L’exposé de ce mal-être de la société américaine WASP est typique d’un certain cinéma de ces années là.

Frank Sinatra qui sort à peine d’une beuverie monumentale, se rend compte en descendant du bus, qu’il est accompagné par une « poule », en la personne de la souriante Shirley MacLaine.

La pauvrette de 23 ans, avec son côté Bunny mal fagotée, est la reine du mauvais goût. Il n’a pas trop envie de se montrer à côté d’elle. Mais comme le veut le néo conformisme, c’est la plus vivante de tous. Un parti pris qu’on pourrait qualifier de gauche, toutes proportions gardées.

Et lui, il boit plus d’un litre d’alcool fort par jour, peut être deux. On en est clairement au stade de l’alcoolisme avancé. C’est par ailleurs un romancier qui a eu du succès mais qui est à présent en panne et ne vit qu’en jouant aux cartes. Cet argent supposé facile est aussi un thème récurrent de ce cinéma là.

Shirley, c’est la naïveté et la joie de vivre mélangées. Elle est profondément amoureuse de Frank, qui lui paraît être ce qu’on peut avoir de mieux comme homme. Il est si intelligent qu’elle ne comprend pas un traître mot de ce qu’il dit. Il est fort et décidé. Il n’hésite pas à se battre. Il a le dernier mot. C’est un homme quoi !

  • A noter qu’on n’a plus trop le droit de se prévaloir de ce type de virilité de nos jours, sous peine de canceling immédiat.

Frank va visiter son frère. Leur rencontre, qui est élargie au cercle familial et à des amis, se révèle

assez artificielle. Mais ça lui donne l’occasion de rencontrer une sorte de Grace Kelly locale, en la personne de la blonde comédienne Martha Hyer. Une jolie intellectuelle, en tout point conforme à ce qu’on attend d’un rôle de blonde gentille et vertueuse, chignon compris. Un cliché supplémentaire. Il se trouve qu’elle est passionnée par l’œuvre littéraire de notre héros. Ça tombe bien ! Mais elle ne semble le voir qu’à travers ce prisme. Ça tombe mal !

Lui par contre tombe fou amoureux d’elle. Mais comme il est passablement alcoolisé il est un peu lourd dans sa drague. Bien qu’assez dégoûtée, elle maintient un pont avec cet écrivain. Elle pense avoir la mission de le remettre à l’écriture. Il y a toujours un côté bonne sœur, dans l’idéal féminin de ces années là.

Je passe sur tous les imbroglios, sur les incompréhensions mais aussi sur les rapprochements.

Frank fait des siennes et finit au commissariat. Son frangin le sort de là. Du jour au lendemain Monsieur The Voice, arrête totalement de boire. Il veut être clean pour tenter de séduire la belle intello. Cela ne se passe pas si bien, car la fille est assez coincée.

  • Un freinage si brutal ne peut pas se faire sans un sérieux accompagnement médical, dans la vraie vie. Mais Sinatra, qui d’ailleurs ne dédaignait pas la boisson, est un super héros, n’est-ce pas ?

Faut de grive il se rabat sur Shirley. Et sur un coup de tête, il fonce se marier avec cette fille improbable. Dean Martin, qui est devenu entre temps son ami de beuverie et son complice de jeux d’argent, n’est pas du tout content que son partenaire du Rat Pack soit tombé si bas.

Il y aura d’autres péripéties et une issue dramatique que je vous laisse découvrir. Je peux juste vous dire qu’un personnage grotesque et jaloux entrera en scène et fera des dégâts. C’est filmé comme au temps du muet, avec du pathos au kilo, des yeux exorbités et des gestes exagérés, le tout sur fond contrasté et musique assourdissante… et dans une fête foraine. Autre cliché obligatoire qui permet la datation de cette antiquité.

Ce film est devenu vieillot à tous points de vue, que ce soit pour la mise en scène, les personnages, le jeu d’acteur, les péripéties… et tout le reste.

Deux heures vingt, c’est bien trop long.

Quand je regarde un tel film, je me demande vraiment pourquoi Vincente Minnelli a une si bonne réputation en tant que réalisateur. Peut-être qu’à l’époque cela passait pour novateur, et cela sans doute par contraste avec l’océan de conformisme des films main stream. Mais à froid maintenant, on se rend bien compte que cela n’a rien de vraiment révolutionnaire.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Comme_un_torrent

Frank Sinatra
Dean Martin
Shirley MacLaine
Martha Hyer
Arthur Kennedy

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