Crime et châtiment. Sternberg, Dostoïevski. Peter Lorre, Edward Arnold. 8/10

Crime et Châtiment de Fiodor Dostoïevski est tellement connu, qu’on pourrait s’imaginer l’avoir lu. C’est pourtant loin d’être toujours le cas.

Ne vous basez pas trop sur le long métrage de 1935 pour prétendre connaître l’œuvre initiale. Les écarts sont nombreux et significatifs. La vision de Josef von Sternberg et de ses scénaristes oblique sérieusement, tout en tentant de coller à ce qu’on attend d’un Peter Lorre, comme sujet principal.

On favorise donc l’image d’un personnage traqué, comme dans M-le-maudit-1931-fritz-lang ou L’homme-perdu. Mais on va plus loin ici, en y ajoutant plusieurs jeux subtiles de type « chat et la souris ».

Dans la bouquin Raskolnikov est un très bel étudiant, aux talents exceptionnels. Dans le film, il est honoré par ses pairs à la sortie de ses études. Dans le livre, il est exclu des études comme un malpropre.

En ce qui concerne l’intelligence, Peter Lorre peut donner facilement le change ; mais pour la beauté on repassera. Cette transposition est cependant possible, à condition que l’on se base sur la beauté intérieure. Ce dont il ne manque pas dans le film. Mais il s’y cache aussi une indicible noirceur. Comme en chaque homme ?

Pour le positif, Raskolnikov qui est un jeune homme très pauvre, a cependant le cœur sur la main. Au delà même de ce qui est permis, puisque sa générosité le met en grand danger.

Ne pouvant payer son loyer, il se débat quotidiennement avec sa logeuse. Elle finira par l’envoyer au tribunal pour dettes. Il est aux abois.

Pourtant, il cherche toujours à aider son prochain.

Il tente de convaincre sa sœur de ne pas se marier avec un « vieux con », pour sortir du marasme. Ce pauvre type friqué, à l’esprit étroit, ne pense qu’à la réduire et à la séparer de son milieu familial. Il va se frotter vertement à lui mais n’en récoltera que mépris et ostracisme.

Il faut donc de l’argent pour sortir sa famille de la dèche. Il y a urgence.

Il rencontre une pauvresse (Marian Marsh) chez la préteuse sur gage et est touché par sa beauté et son extrême dénuement. Là encore il faudrait des roubles. Il lui donne tout ce qu’il a.

Comme sa spécialité universitaire est la criminologie, il va s’essayer à un crime parfait. La victime sera cette épouvantable usurière qui étrangle financièrement tous ses clients. Il s’agit d’écraser une punaise, rien de plus.

Le meurtre n’est pas si bien organisé que cela. Mais il s’en sort quand même. Un vagabond fou va être pris à sa place. Le dément finira même par s’accuser.

L’inspecteur campé par Edward Arnold attend son heure. De part ses intuitions basées sur le comportement souvent bizarre de Raskolnikov / Peter Lorre, il se doute qu’il a devant lui un coupable potentiel. De plus le jeune criminologiste ne cesse de se frotter à lui en se manifestant par bravades et provocations. Arnold joue remarquablement bien. Ce duo chasseur-chassé contribue à la qualité de la version ciné.

Et comme «  le meilleur ennemi de l’homme, c’est lui-même  », Raskolnikov finira par se sentir écrabouillé par les remords. La jeune pauvre qu’il aime secrètement est elle nimbée de vertus. Il va falloir faire coincider cela avec son crime par générosité. Pas facile ! Des scrupules christiques ou apparentés vont donc l’amener à se dénoncer. La belle l’attendra.

Malgré quelques discrètes maladresses, ce film à l’écriture rapide et efficace, restitue bien la nécessaire atmosphère écrasante. Une réussite.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Crime_et_Ch%C3%A2timent_(Sternberg,_1935)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Crime_et_Ch%C3%A2timent

https://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_Lorre

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