Happy Sweden (2008) 8/10 Östlund

Temps de lecture : 4 minutes

Le renouveau brillant du film à sketches.

Le néoréalisme italien, s’est illustré dans ce genre, mais en pratiquant le plus souvent l’humour et la dérision.

Cette critique est décomposée en deux parties désormais :

  1. Avis. Film. Happy Sweden – Östlund (2008) 8/10
  2. Aperçu – Film – Happy Sweden – Östlund – Résumé. (2008) 8/10


Ici ce sont 5 tableaux sérieux qui montrent 5 situations ordinaires. Rien de très spectaculaire à première vue.

Mais une puissante dynamique de groupe.

Et à chaque fois, l’idée d’un instant décisif. Un point d’incertitude où tout peut basculer.

Et où au final, rien ne se décide vraiment.

Chaque scène sera à même de donner à l’individu une leçon, à ceux qui voudront bien l’entendre.

Une sorte de néo-néoréalisme bienvenu.

Le titre est trompeur. A l’origine c’est « Involontaires », mais c’est devenu chez nous « Happy Sweden »

Et donc, ce n’est pas comme on le dit souvent, un portrait de travers de la société suédoise. C’est bien plus universel. Cela a trait à notre cheminement individuel, dans nos sociétés dites avancées, quelles qu’elles soient. Et puis il y a cette dimension de vécu.

1) Une réunion familiale et amicale à Nouvel An, donne lieu à un petit feu d’artifice. Déjà, et ce n’est pas coutume au cinéma, le spectacle pyrotechnique est bien maigre. Comme le serait celui d’un très modeste amateur. Et le chef de famille un peu bourré trouve moyen de se prendre une fusée dans l’œil. Toute la problématique subtile consiste à sentir les pressions d’avant et après ce petit drame, pour que le patriarche soit prudent, puis pour qu’il aille se faire examiner à l’hôpital. Ça n’a l’air de rien, mais tout est là, dans le non-choix. Rien à voir avec de l’anecdote. C’est la psychologie qui domine.

2) Deux très jeunes adolescentes commencent à être secouées par le déferlement hormonal. En famille, ce sont encore des petites filles. A l’extérieur, elles provoquent sexuellement. Pas qu’elles soient portées par un groupe, et qu’elles tentent de surenchérir dans la provocation. C’est plutôt leur génie intérieur qui les pousse à faire comme les grands, en plus outrés.

Fardées et extraverties, ces fluettes gamines, bousculent verbalement un jeune homme coincé dans le métro. Toujours borderline entre une grotesque agitation et l’inspiration d’un vrai désir. Le pauvre gars ne sait pas sur quel pied danser. Le point d’incertitude.

Plus tard entre copines, elles boivent de façon déraisonnable et en renversent sur le tapis. Partage entre peur crasse des parents et envie de s’affranchir.

Leur histoire se termine lamentablement à l’orée d’un bois, avec une faune incertaine. L’une des garces est en quasi coma éthylique. Une voiture s’arrête et embarque la fillette. Tout est possible. Mais comme le film n’est pas un thriller, peu importe. Ce qui compte, ce sont les tenants et aboutissants de cette tentative d’éclosion.

3) Une maîtresse d’école fraîchement arrivée dans son établissement, assiste à une reprise en main d’un élève, un peu musclée. La scène se déroule dans des couloirs et n’est pas clairement exposée. Pour elle, il y a assez d’éléments pour y voir la violence d’un adulte contre l’élève. Donneuse de leçon, elle va se heurter aux autres collègues, dont le fautif. Il s’en suit une montée en puissance des uns et des autres. Les arguments sont échangées et personne ne semble vouloir céder. A chaque instant, le doute et l’indétermination sont plus forts, pour eux, comme pour nous. C’est finement ciselé. Un peu comme dans « Carnage » de Polanski.
Et si cela ne suffisait pas, le réalisateur enfonce le clou, avec une scène finale où l’institutrice obstinée, réclame qu’on lui parle en face. L’embarras est total.

4) Un voyage en bus anodin, va évoluer vers une situation étonnante. Le chauffeur-propriétaire expose ses tracas à une accompagnatrice docile. Les voyageurs principaux sont scrutés les uns après les autres. On ne sait pas ce qu’il va arriver. Qui ou quoi sera au centre de l’histoire. Eh bien, ce sera une minuscule tringle à rideau, qu’on a fait tomber parterre dans les toilettes.

Le conducteur ne veut pas repartir si personne ne se dénonce.

La « coupable » pense que c’est ridicule et ne veut pas céder.

La situation est bloquée. On est dans l’hyperbole du petit grain de sable qui risque de tout dérégler.

Ici comme dans les sketches précédents, on se sent touchés personnellement par ce qu’il arrive. Des conflits analogues ont du se produire autour de nous. C’est certain. Et notre être a aussi été façonné par cela. Plus sans doute que par de grandes théories.

5) Le dernier sketch est plus délicat à manipuler. Un groupe de jeunes homos et de gay-friendly se balade dans les champs. L’un d’eux bifurque pour aller pisser. Un autre le rejoint pour, crie-t-il, « lui sucer la bite ». Et par goût et par provocation. L’autre n’en a pas envie, mais continue à y être invité de manière pressante. Cela prend le chemin du harcèlement sexuel.

L’affaire se dénoue, mais le groupe est ébranlé. La « victime » ne sait pas trop si elle a surréagit ou non. Où en est-il vraiment par rapport à tout cela. C’est la question et il n’y aura pas de réponse, ici non plus.

En filmant de très haut, en ne montrant ni les visages, ni les détails, le cinéaste souligne habillement la dynamique du groupe.

Le jeuneRuben Östlund est déjà un grand réalisateur en 2008. Il est de son temps, celui des jeux vidéos hyperréalistes et hyperréactifs. Sa prise de vue participe de ce regard distant et maîtrisé, à portée d’un clic.

Il a l’enthousiasme des aventuriers et des défricheurs. Il aime son métier. Et il est clair qu’il ne le fait pas, que pour la gloire et l’argent.

Il fait peur à la plupart de nos critiques français. C’est bon signe !

On lui doit aussi les remarquables Snow Therapy (2014) et The square (2017) et Play (2011)

Cette critique est décomposée en deux parties désormais :

  1. Avis. Film. Happy Sweden – Östlund (2008) 8/10
  2. Aperçu – Film – Happy Sweden – Östlund – Résumé. (2008) 8/10

https://fr.wikipedia.org/wiki/Happy_Sweden

Villmar Björkman
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