Un Tintin chez les Jivaros, mais qui serait lui sexué. Ou bien la trame d’un futur OSS117 et le Temple du Soleil en mode parodique. Il y a des deux.
Le beau héros est incarné par le très carnassier Fernando Lamas. C’est un beau brun qui arrive à nous faire des sourires forcés toutes dents dehors, même au combat, comme Dujardin.
Voilà un latin lover de premier plan, qui de surcroît semble intègre et travailleur, à la ville comme à la scène.
- Ce redoutable séducteur argentin s’est marié 4 fois et n’a eu que des bombasses. Perla Mux, Lydia Barachi, Arlene Dahl, Esther Williams… pour les officielles. Le coquin ne laisse donc pas grand-chose pour les autres. Je n’arrive pas à m’enlever l’idée, qu’un gars avec un si grand palmarès est forcément méritant.
Ici, notre gaillard sportif, n’est pas motivé par un clone de la volumineuse Castafiore, mais par une diva bien plus attirante, la belle Rhonda Fleming. Cet étonnant personnage est capable d’abstinence deux années durant et peut se contenter de regarder avec piété de la photo de son ex défunte. Une figure que l’on ne voit que dans les fictions subordonnées au vertueux et castrateur code Hays. Au dessus d’un tel saint laïque, il n’y a guère que quelques privilégiés qui lévitent au dessus de la caste des moines.
Pour le reste, on s’y croirait. On y trouve l’esprit d’aventure para-colonial, avec le sens du sacrifice et de l’amitié chez les meilleurs et la rouerie crasse pour la racaille. Il n’y a qu’à puiser dans ce réservoir d’échoués de la vie. Entre les deux, il y a quelques capitaines Haddock qui ont sombré dans l’alcoolisme équatorial.
Les Indiens sont plus caricaturaux encore que dans la BD. Au mieux, ces sauvages sont des porteurs pas très courageux, pas malins du tout, facilement séduits par la verroterie ou une photo du Président Coty. Au pire, ce sont clairement des bêtes, des réducteurs de tête. D’ailleurs on ne discute pas avec ceux qui n’ont pas été apprivoisés. On tire dans le tas sans somation, c’est plus prudent. Même la belle Rhonda, tout sourire, ne se fait pas priver pour faire un carton.
Du côté des blancs, que ce soit chez les gentils et ou chez les méchants, il n’y a guère d’empathie pour les indigènes. On est loin des mea culpa et de l’expiation forcenée, auxquels on assiste de nos jours.
Les filles natives les moins moches couchent, mais ne sont alors que des pis-aller. Les coloniaux ferment sans doute les yeux pendant les rapports. Ils doivent penser à quelque chose, qui dans leur tête, est plus estimable. Le genre caucasien (les leucodermes), comme disent les anthropologues.
Les autres femmes colorées font le ménage et la cuisine. Rien ne se perd, tout s’exploite, chez les partisans d’une fortune rapide et facile. Trois petits tours et puis s’en vont.
Au beau milieu de l’histoire, il y a ce palais cyclopéen en ruine, perdu dans la forêt vierge. Là où est le trésor forcément. Mais là il faut bien avouer que Hergé est plus sérieux. Il n’aurait pas délocalisé un édifice, qui fait très Amérique centrale, au fin fond de l’Amazonie ou cela n’a jamais existé. Il est plus méticuleux et se renseigne fortement avant de remplir les cases. Pour la réalité ethnologique, il aurait été plus prudent de se cantonner à une statuette à l’oreille cassée.
J’adore les trésors dans les films d’aventure. Mais là ils ne se sont pas foulés. Ils se sont contentés de repeindre quelques cailloux pour essayer de les faire passer pour de monstrueuses pépites d’or.
Quoiqu’il en soit, le spectateur, même le plus compréhensif, a toujours du mal à accepter qu’on abandonne un tel magot, surtout si c’est sous le prétexte de ne pas offenser les dieux du cru. Faut pas pousser quand même ! Moi l’incroyant, j’aurais gardé une pépite dans ma poche.
Les mauvais sujets, ceux qui ont fait ce que j’aurais voulu faire, sont punis par la justice immanente.
Le gentil protecteur de la veuve et de l’opprimé (Indiens exclus), sauve les meubles, ne fait pas fortune, mais empoche la dulcinée en tant que récompense. Ce qui n’est pas si mal.
Le rêve américain est clairement basé sur l’idée du profit. Lequel devrait être mérité, si l’on en croit la règle. Il est donc curieux que dans les scénarios, l’appât du gain soit tellement conspué. Il doit y avoir quelques cathos, fâchés par essence avec les sous, qui parasitent la ligne entrepreneuriale d’origine protestante.
Une histoire ultra classique, qui aboutit à une chasse au trésor vraiment sans surprise. Dès les premiers plans on sait ce qu’il va arriver.
Les spectateurs d’alors cherchaient-ils vraiment à retrouver le même sempiternel canevas ? Ils n’étaient pas lassés ? Ou bien les studios étaient-ils juste en panne d’inspiration ? Les thèses varient sur ce point. Mais l’idée unificatrice d’un cinéma prototypé, à la chaîne, qui ne veut pas sortir d’une ligne commerciale déterminée et qui a fait ses preuves, est la plus probable. C’est encore vrai pour le main stream d’aujourd’hui, dans de nombreuses expressions « artistiques », au ciné comme dans la médiocre chansonnette…
En regardant ce récit, empêtré dans les préjugés, je n’ai pu m’empêcher d’imaginer que ce serait un sujet en or, sur le mode OSS 117 avec Dujardin.
https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Appel_de_l%27or
Fernando Lamas
Rhonda Fleming
Brian Keith