Une bonne comédie italienne qui révèle que Fellini est capable d’être un bon exécutant, dans un long métrage plaisant, typique de l’époque. Le premier vrai film du maître, mais une œuvre assez impersonnelle en réalité. Il faut vraiment creuser pour y voir sa patte. Par contre la réalisation est propre et nette. Du bon boulot.
Revu ici :
C’est un scénario intéressant, mais qui est réalisé de manière assez classique. En particulier les personnages sont conformes à la tradition cinématographique et non pas des gueules et des caractères libres, comme on les connaîtra chez lui par la suite. Seul Sordi grimé, en tartufe de légende (Tartufo), échappe à cela, ce qui nous donne un contraste saisissant d’ailleurs.
Et puis il y a une sorte de suspense pour retenir l’attention. Les films de la grande époque n’auront plus besoin de cela.
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Un jeune couple vient se présenter à la famille romaine du mari. Malgré tous leurs efforts, ces gens sérieux et respectables de la bourgeoisie, ne verront l’épouse qu’à la toute fin de l’histoire.
Le mari est un peu trop rigide et dominateur avec sa femme, et passablement obséquieux avec sa famille. Il craint l’opinion de cette tribu haut placée. Voulant toujours sauver la face, il sera en décalage tout au long du film.
La jeune femme naïve et timide voudrait profiter de ce séjour à Rome pour voir son héros, l’acteur Rivoli qui interprète le Cheik blanc, un personnage de roman feuilleton. Elle a échangé avec lui en toute discrétion, par le courrier des lecteurs. Mais ce furent quand même des propos romantiques enflammés. Elle est totalement fascinée par l’image que le bellâtre renvoie. Elle croit dur comme fer qu’il a les qualités du personnage. Elle ne pense pas à mal, c’est une poussée romantique de midinette.
Mais cet homme est en réalité un acteur de deuxième zone. Il se voudrait une sorte de Rudolph Valentino (Le Cheik – 1921) – Il est remarquablement interprété par Sordi, comme un comédien suffisant et médiocre, qui affiche haut mais roule en Vespa et se trimbale une grosse bobonne revêche. Il est très loin de ce noble héros qu’il incarne.
Pensant pouvoir s’échapper dix minutes, elle se retrouve coincée avec la troupe d’artistes. Elle n’a aucun moyen de s’échapper. Elle finit par rencontrer Rivoli et tombe platoniquement sous son charme. Lui tente d’en profiter. Cela va durer toute la journée.
Le pauvre mari, qui devait rencontrer avec elle sa famille, est totalement désemparé par ce retard. Il tente par tous les moyens de l’excuser auprès des siens. Mais l’impatience gagne.
Il tombe par hasard sur une lettre échangée avec le Cheik. Il l’interprète comme un rival sérieux qu’elle aurait rejoint.
Tout part à vau-l’eau.
Il y aura un rétablissement final. Et à la dernière minute tout rentrera dans l’ordre. Mais de très peu.
Je passe donc sur ces suspenses qui n’ont finalement pas tant d’importance et appartiennent plus au vieux cinéma qu’à la Révolution Fellini.
Ce qui compte c’est le choc des cultures, avec les artistes pas si brillants que cela d’un côté et les bourgeois corsetés de l’autre.
Mais l’intérêt tient aussi et surtout à la magnifique interprétation de Sordi, en coquin qui a atteint son niveau d’incompétence (principe de Peter) et qui profite de son statut usurpé, pour approcher la toute timide Brunella Bovo. Ce n’est pas pour rien qu’à un moment retentit l’air de la séduction de Don Giovanni quand Zerlina est à deux doigts de céder « non son più forte! »
A noter Nino Rota à la musique et Giulietta Masina en prostituée nommée Cabiria (déjà!)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Cheik_blanc
Brunella Bovo
Leopoldo Trieste
Alberto Sordi
Giulietta Masina
