Les Canons de Navarone. Avis, leçon de patriotisme. Gregory Peck, David Niven, Anthony Quinn. 6/10

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Dans cette légende des Canons de Navarone, il y a des moments de vérité qui nous interpellent.

Comme lorsque le groupe doit éliminer l’un d’entre eux, estimé trop dangereux. Soit parce que c’est une belle traîtresse (Gia Scala). Soit, parce gangrené et laissé sur place, même un homme courageux peut parler sous la torture ou la scopolamine (Anthony Quayle).

Le film américain nous fait le coup deux fois. Et en dehors de cela, il n’a pas de grandes innovations scénaristiques à nous proposer.

Certes, grâce à la loupe grossissante du cinéma de genre, on observe de près les nombreuses épreuves et souffrances de ces soldats. Lesquels sont donnés d’emblée comme perdants.

  • Une chance sur un million de réussir la mission, dit un gradé. Alors que l’on sait que dans ce type de film, qu’au contraire, il y a une chance sur un million que cela se termine mal pour les héros.

Et cepathos est quand même un peu trop étiré.

Je pense à l’ultra violente tempête en mer qui ne manque pas de leur tomber sur le nez, et les affres qu’elle va forcément occasionner. Cet exposé dure trop longtemps, d’autant plus que l’on sait parfaitement qu’ils s’en sortiront.

C’est le même problème avec l’escalade casse-gueule des falaises de Navarone. Toujours ce jeu avec nos nerfs, pour des glissades presque mortelles et surtout des rattrapages de justesse. Fausses incertitudes.

Les canons sauteront-ils ou non ? Le suspense de la bombe déclenchée par la descente d’ascenseur, n’est pas trop prenant en soi.

Il y a donc cet engin explosif, forcément aléatoire car artisanal. Ce qui peut paraître léger eu égard à ces énormes monstres de fer. Pour mieux nous titiller, on insiste sur le fait la charge redoutable est à peine caché. On fait examiner les lieux par de nombreux soldats allemands, qui ont pourtant l’air extrêmement sérieux dans leurs fouilles. Logiquement ils devraient la trouver.

La bande des gentils est toujours à deux doigts d’être neutralisée. D’ailleurs elle se fait prendre à plusieurs reprises.

Bref, on feint de mettre tous les atouts du côté obscur de la force, l’histoire de rendre l’exploit du clan du bien, plus héroïque, plus croustillant.

C’est un art de savoir stimuler le désir de victoire, chez le spectateur de films de guerre. D’où les vieilles astuces consistant à mettre autant de bâtons dans les roues que l’on peut. Et dire que l’on marche si souvent, qu’on galope parfois.

Bien sûr, qu’il y aura une apothéose finale, avec des cris de joie, voire une larmichette, du côté du bien. Qui peut en douter ?

Le réalisateur J. Lee Thompson prend beaucoup de soin à graduer l’intensité dramatique, à différer la chute. Il doit donc assumer d’avoir donné à l’intrigue ce côté désagréablement artificiel. Mais qui s’en souciait à l’époque ?

Gregory Peck, David Niven, Anthony Quinn forment le chœur des moins-disants et des plus-agissants. Le talent de ces francs tireurs, à la ville et à la scène, est incontestable. Ils résistent même à la confrontation de leur puissant jeu d’acteurs. Le flux de l’un n’éteint pas celui de l’autre. Ils s’amplifient même. Ce qui n’est pas si évident que cela, alors qu’on pourrait être dans ce registre mâle du « qui a la plus grosse… détermination ». Ce n’est pas forcément Zorba le Grec qui l’emporterait d’ailleurs, même si Irène le désigne précisément comme l’Homme le plus affirmé, donc le plus désirable.

Il y a chez eux, ce qu’on appelle communément « être un homme ». En tout cas dans l’acception de ces années là. Et moi qui a baigné dans ce jus idéologique, je ne sais toujours pas s’ils sont des références ou non. Mai 68 est passé par là.

D’autres visages nous sont connus. Anthony Quayle, Irène Papas … Et ils ne sont pas que des seconds rôles.

Les Allemands, dont on semble pourtant vanter les mérites et l’efficacité, tirent curieusement toujours à côté, qu’ils soient à pied, en avion ou dans n’importe quelle situation.

Les décors-maquettes en carton pâte sont franchement nuls. L’explosion finale, celle que tout le monde attend, fait cheap.

Mais une fois de plus, les jurés des Oscars n’ont pas été trop difficiles :

Le public a lui aussi beaucoup aimé, ce film fabriqué pour.

  • J’ai le souvenir que très jeune, en séjour linguistique à Brighton, j’ai vu la famille d’accueil verser des larmes, en visionnant un film sur l’héroïsme des pilotes britanniques. Un peuple civique et nationaliste au sens large et qui prend ces films au sérieux.
  • Ils ne peuvent pas comprendre les planqués cyniques que nous sommes, généralement. Sous prétexte d’esprit critique, plutôt le bouclier que le glaive, de notre côté de la Manche. Et le panache et la bravoure à 30 km de chez nous ? Qu’est ce qui cloche ?

https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Canons_de_Navarone

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