Maurice (1987) 6/10

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Ma femme s’appelle Maurice ? Celle là, on a du la faire souvent.

Voilà une histoire d’amour bien mièvre et bien longue (140 minutes). Et le fait que cela se déroule chez des homosexuels ne me convainc pas plus que cela. Je ne supporte pas la guimauve sentimentale dans les films hétéro. Et donc je me prends encore plus mes distances sur ce qui ne m’attire absolument pas, surtout lorsque le thème est traité de la même manière lourdement « romanesque ». Le pathos est trop apparent, la mollesse aussi. Et l’injonction à épouser la cause est trop soulignée.

On n’a plus trop le droit d’affirmer cela, tant la pression minoritaire est devenue une force exagérément puissante. Et ce phénomène est très généralisé. La majorité, largement culpabilisée, a intérêt à se faire toute petite. Elle doit payer à présent. Là aussi sévit désormais la rente mémorielle.

Comme cela se passe en Angleterre, au début du vingtième siècle, on est encore dans une période de prohibition. On n’admet pas le « contre-nature ». La sanction est le fouet et/ou la prison. On connaît l’affreuse histoire qui est arrivée à Oscar Wilde et certes on compatit sans hésiter. Ce fut une parenthèse peu glorieuse du passé occidental. Il faut dire que la société ne comprenait rien à l’homosexualité et faisait tout pour circonscrire ce phénomène.

Mais pourquoi devrait-on payer de nos jours pour cette problématique d’un autre âge ? Nous voilà contraint à une sorte de soutien moral posthume de ce qui fut jadis une minorité pourchassée. Une sorte de fond de commerce victimaire qu’on tente de ressusciter. Oui je sais que cela peut encore arriver. Mais vraiment on a beaucoup progressé. La majorité silencieuse a atteint maintenant largement le stade de l’indifférence. C’est d’ailleurs peut être cela qui ne plaît pas.

Celui qui risque la prison désormais est celui qui ose encore faire une blague sur les homosexuels. J’exagère à peine. Ce qui est en cause c’est le droit de s’exprimer et non plus le droit de faire. Là, on peut parler d’inversion.

On a vite compris ce scénario. Pour vivre heureux, vivons cachés. Le danger guette en permanence. La famille ne l’accepte pas. La société encore moins. Il faut se défier de ses amis et même de ses amants. L’entôlage et le chantage sont des périls constants. Qui se cache réellement derrière celui qui me fait des avances ?

Une fois que l’on a fait le tour de la question, il semble que la chair soit triste hélas… Il y a d’un côté une certaine tolérance pour les amours masculines platoniques, mais dès qu’on entre dans le vif passionnel et sexué, cela devient acrobatique.

Les films anglais sur cette époque, qui se passent dans la haute bourgeoisie et/ou l’aristocratie, ont toujours ce bizarre côté collet monté et prétentieux. Ces comportements imposés de classe passent d’autant moins la rampe que la traduction doit détruire tout le sel de la conversation. Cela sonne faux à nos oreilles. L’arrière fond Cambridge ou Oxford et les références aux classiques étant supposés nous dévoiler un monde subtil et ultra-cultivé. Autant dire que je ne marche pas dans ces faux-semblants et que je m’ennuie royalement (God Save qui vous voudrez)

Notre blondinet joué par James Wilby ne fait pas trop de manières. Certes il tombe en larmes régulièrement comme une femme de l’époque, qui aurait des vapeurs. Mais dans l’ensemble il est neutre.

Ce coquin de Hugh Grant s’est laissé aller à un flirt homo sans conséquence, avec le gars qui squatte le paragraphe ci-dessus. Mais il a obliqué rapidement vers les canons sociétaux de l’époque. Il a donc fait un beau mariage. Il semble heureux.

Reste à savoir si la doxa minoritaire en fera une victime qui fait semblant d’être hétéro, un malheureux refoulé. Le film semble dire qu’il est bien dans sa peau. Le mystère reste entier.

Rupert Graves nous joue le tentateur gourmand qui navigue dans les basses couches sociales. Celles à qui en théorie on ne demande pas trop de rigueur morale.

Il va initier James au plaisir charnel. Il était temps. Cela faisait quand même un bail que cet aristocrate se morfondait dans son petit coin.

On a le droit à un final triomphant où les deux amants réunis ont vaincu leurs démons et sont dans la félicité. Cela se termine toujours comme cela dans les récits à l’eau de rose.

Le fait que cela soit basé sur un livre autobiographique d’Edward Morgan Forster n’en fait pas plus un chef d’œuvre.

James Ivory s’attarde souvent sur les inextricables tensions sentimentales et les conflits de conscience, comme avec le longuet Retour à Howards End (140 minutes) ou Les Vestiges du jour (134 minutes). Et j’avoue que j’ai du mal avec cela, homosexualité ou non. Même si je reconnais qu’il peut avoir la manière.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_(film)

James Wilby
Hugh Grant
Rupert Graves

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