On accuse souvent le bon peuple français d’avoir des travers royalistes, qu’ils aiment ou qu’ils veuillent couper la tête à leur président. Ce qui n’empêche pas que l’on critique régulièrement la manière dont ce souverain tout puissant dirige le pays.
Ce « pouvoir absolu » serait une dérive de la cinquième république, un coup d’état permanent au profit du monarque du moment. Même le plus critique envers le système autocratique, François Mitterrand, a revêtu sans discuter les attributs du roi. Non seulement il s’est satisfait de la pompe une fois oint, mais encore il s’est empressé d’imprimer sa marque. Il y avait le style « Louis XV » par exemple, il y aurait des chantiers pharaoniques pour imprimer son propre style.
On sourit de ces travers ancien régime. Mais que dire des révérences quasi obligatoires des Américains pour leur dirigeant suprême ? Il y a tout ce qu’il faut pour le sacraliser. Déjà, il est inimaginable de critiquer la fonction présidentielle, surtout que là bas le dirigeant tout puissant a le privilège de faire des bénédictions publiques au nom de Dieu : « God bless America » dit-il à tous bouts de champ. On a fait mieux dans le genre républicain.
Il n’a pas de couronne proprement dite, ni ce sceptre, mais c’est tout comme. Il a d’ailleurs un palais présidentiel, tout de blanc, couleur de sainteté papale. Le bureau ovale correspond au chœur de la Basilique.
Vous cherchez les nouveaux attributs ? Il y a bien sûr les drapeaux et toute ces sortes de choses. Mais il faut voir plutôt du côté de la garde royale. Ces men in black, tout équipés avec lance, épée et oreillette. C’est d’ailleurs de ces gardes du corps qu’on parle dans le film. Ce ne sont pas de simples manants mais des officiers de haut rang désignés pour leur loyauté. Loyauté rime bien avec royauté.
La grande noblesse ne se balade que dans ces nouveaux chars royaux, que sont ces lourdes limousines blindées à armoiries. Ce serait d’ailleurs un crime lèse majesté qu’un homme ordinaire (mais riche) en acheta une semblable.
Pour creuser la différence, la junte régnante ne fait pas mieux que les barons de la drogue. Ils ont un avion privé, l’Air Force One, comme à peu près « tout le monde » mais en bien plus disproportionné. De plus on est obligé d’écrire ses trois mots sacrés en Majuscule.
Un petit avion serait plus pratique, mais en imposerait beaucoup moins.
L’hélicoptère impérial permet de se distinguer davantage. Il y a peu d’individus qui peuvent s’en permettre un. Seuls les méchants légendaires dans un James Bond en ont parfois.
Le sous-marin individuel n’est pas pratique pour se déplacer dans le Potomac.
Vous noterez que dans leurs virées, ils ne s’arrêtent jamais à un feu rouge. Même s’ils ont le temps et ne font que vaquer à leurs loisirs. C’est pour bien montrer leur essence surnaturelle. Ils « volent » en quelque sorte au dessus du monde commun et ne sont pas stoppés par les contingences. L’homme du peuple doit piler déjà à l’orange, même s’il n’y a strictement personne en vue. C’est en quelque sorte la déférence qu’ils doivent aux tout-puissants. La police ne punit pas le risque pris, mais l’irrespect fondamental.
Leurs minimes déplacements à pied correspondent à une concession mesurée et rituelle, chargée de les rendre « humains » auprès de la piétaille. C’est un peu Jésus qui va laver les pieds une fois par an.
Cette petite réflexion a été inspirée par le film suivant :
Ci dessous une petite sélection de très bon et de bien moins bon :
La limousine de Poutine ressemble furieusement à l’affreuse Cadillac One des présidents US
