Passante du Sans-Souci. Avis film Romy Schneider – Michel Piccoli – Ruffio 5/10

Temps de lecture : 3 minutes

Attention terrain miné !

  • Il est difficile de critiquer un film empreint d’une telle gravité et qui nous somme de taire nos objections. Car il faut avant tout se recueillir sur les victimes du nazisme. Vouloir outrepasser ce tabou équivaudrait à avoir un coeur de pierre et une absence de conscience.
  • Il est mal venu également de ne pas chouchouter la pauvre Romy Schneider. Ce fut son dernier film et elle était au bord du naufrage. Son fils David est mort accidentellement un an avant (1981) et elle disparaîtra l’année de la sortie de ce film (1982), suicidée ou peut être victime d’overdose médicamenteuse et d’alcool. Il n’y a pas eu d’autopsie, pour ne pas « casser le mythe ». Curieux privilège.
  • Depuis on assiste à un curieux culte de sa personne, qui n’a plus rien à voir avec sa carrière. Comme pour Lady Di, elle semble incarner une pauvre madonne des causes perdues. L’actrice mérite mieux que cette imagerie sulpicienne sacrificielle.

40 ans après on peut quand même voir ce film indépendamment des ces deux injonctions à l’indulgence.

Jacques Rouffio n’a pas fait un bon film. Il ne fait que jouer sur les émotions faciles, les pleurs, l’indignation, le pathos, la colère et la vengeance.

Et ce scénario de Jacques Kirsner et Jacques Rouffio est très datée de ces années là. Michel Piccoli nous fait un chef d’une sorte d’Amnesty International, qui va régler ses comptes avec un tortionnaire nazi qui était en place en France à cette époque. On voit les exactions de ces brutes assassins à Berlin dans les années 30. Ses parents seront tués comme juifs et lui enfant aura sa jambe définitivement brisée.

Lors de sa fuite en France, accompagné de sa protectrice, il sera rattrapé par la meute sanguinaire.

Cette femme adulte qui veillera à son jeune destin, sera quasiment obligée de se prostituer. Elle boit car payée à la « roteuse » et devient alcoolique.

Elle fera sortir son mari des camps en couchant avec un chef nazi local. Mais le couple sera massacré à Paris par la suite. C’était une arnaque.

Piccoli ne peut pas expliquer pourquoi il a tué de sang froid, au présent, celui qui est devenu l’ambassadeur du Paraguay, mais qui a aussi fait ce coup bas de la fausse libération du mari, puis le meurtre du couple. Ce recours à la violence est contre ses convictions.

Le film se permet des ellipses vers la fin. On apprend que Piccoli n’a pas été en prison, qu’il a eu du sursis. Mais que finalement lui et sa compagne Romy seront eux aussi « exécutés » en pleine rue. On fait passer un bandeau qui explique cela, comme dans les biopics.

Une bizarrerie assumée fait que c’est la même Romy Schneider qui joue la femme qui l’a protégé enfant et sa compagne d’après. Soit un bond avec des décennies de différence. Sans doute veut-on faire passer cela pour un attachement à une sorte de femme unique de sa vie. Une image d’avant qu’il recherchera après.

C’est basé sur un roman de Joseph Kessel. Mais comme ce livre a été publié en 1936, il ne peut bien entendu pas assumer la plus grande partie de l’histoire qui se situe après. Faire référence à Kessel est juste de la foutaise.

L’aspect bonne conscience et mises en scène d’organisations humanitaires est typique de la vision de gauche de cette époque. Des causes justes, mais aussi une nette tendance à penser avoir le « monopole du coeur »

D’accord avec le journal le Monde et Jean-Louis Mingalon qui n’hésitait pas à dire, dès 1987 (5 ans après) que “La Passante du Sans-Souci a été un succès commercial mais ce n’est pas pour autant un grand film.”

https://www.lemonde.fr/archives/article/1987/06/21/la-passante-du-sans-souci-la-double-casquette-de-jacques-kirsner_4050623_1819218.html

https://www.lemonde.fr/archives/article/1982/04/17/contre-l-oubli_2901899_1819218.html

https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Passante_du_Sans-Souci_(film)

Envoi
User Review
0 (0 votes)

Laisser un commentaire