Au risque d’en surprendre plus d’un, osons mettre un 7/10 à ce péplum de 1959.
Cette démarche vise à saluer le classicisme de bon aloi qui charpente le film ; ainsi que sa bonne tenue eu égard au genre.
- C’est un peu comme pour le théâtre de Corneille, de Racine et de quelques autres, pratiquement plus personne ne goûte réellement à ces pièces, mais l’estime demeure dans un petit coin de nous-même et dans un plus vaste inconscient collectif. Et si en plus, c’est la Comédie-Française qui s’en occupe, on serait même tenté d’y aller voir de plus près. Ici les acteurs sont de qualité.
- (je mets de côté l’intemporel Molière qui n’est pas concerné par cette mise au placard)
Le récit parvient à nous transmettre l’ensemble des émotions de ce consul romain, fortement impliqué dans sa mission en Syrie chez Zénobie, la reine de Palmyre. Il arrive en conquérant. Il chute.
Les officiels palmyriens maltraitent cet envahisseur, en le traitant en esclave de dernier rang. Alors qu’il est sur le point de mourir, on le réhabilite vertigineusement. Au point qu’il partage in fine la couche de l’envoûtante monarque, quasi d’égal à égale.
Le premier ministre traître Folco Lulli se méfie de lui à juste titre. Ses supérieurs, mais aussi une partie éclairée des Syriens, lui font confiance… et bien qu’il soit sur des montagnes russes, il reste lui-même, confiant dans sa destinée et ardent dans son devoir. Ah si c’était vrai tout cela ! Quel homme !
Je n’avais pas trop bien compris la déclaration d’amour de Fellini pour Anita Ekberg dans son film La dolce vita (en 1960, juste un an après Sous le signe de Rome) ( la fontaine de Trevi, à Rome, avec son Marcello Mastroianni) – Mais dans l’oeuvre qui nous occupe, elle donne en effet une prestation de premier plan, en tant que maîtresse femme antique… La palette est étendue puisqu’elle sait être dure à ses heures, mais elle devient fondante comme un mint cream, quand son corps et son coeur lancent leurs profonds appels. La Suédoise est convaincante et le spectateur mâle qui n’a pas été castré par nos féministes les plus sectaires, se laissera facilement attraper. Quelle femme !
La cubaine Chelo Alonso est une autre manifestation brûlante de la Féminité (avec un grand F). Elle figure la brune rusée et fourbe, en opposition avec la franche ultra-blonde précédente. Elle nous fera le numéro obligé de la danse lascive de banquet. Cela décoiffe même ceux qui arborent la très solide frange de la romanité et la “moralité” qui va avec. (Les Romains au cinéma (Mythologies, Roland Barthes)
Pour équilibrer les deux pôles extrêmes précédents, il faut une belle innocente. C’est Lorella De Luca fait la vestale Bethsabée.
On rajoute un chrétien de mythologie demi-doux, pour faire plus antique. Il tendra l’autre joue et se fera tuer.
Gino Cervi en Empereur Aurélien, fera bien rire ceux qui ont reconnu notre Peppone, le maire communiste qui s’oppose à Don Camillo.
Les décors de style mésopotamien sont lamentables ; dont d’affreuses imitations des bas-reliefs du palais de Ninive. Pourtant dans sa forme originale, cet art est prodigieux, il suffisait de copier. Allez le voir dans sa prodigieuse authenticité, au British Museum par exemple, mais aussi au Louvre et à Berlin.
Vous n’êtes toujours pas convaincu de voir ce péplum ? Je rajoute alors que Sergio Leone a aidé le bon réalisateur Guido Brignone dans la scénarisation.
Brignone, qui a démarré dans le muet, est mort l’année de sortie de ce Sous le signe de Rome (Nel segno di Roma) – les critiques fumeux et paresseux ont sans doute parlé de film-testament. Mais on a beau se contorsionner, on ne voit pas trop comment faire entrer le long métrage dans cette case mortuaire.
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https://fr.wikipedia.org/wiki/Anita_Ekberg
https://fr.wikipedia.org/wiki/Folco_Lulli
https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Marchal_(acteur)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Gino_Cervi
https://fr.wikipedia.org/wiki/Chelo_Alonso
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guido_Brignone
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sous_le_signe_de_Rome