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Répulsion est un long-métrage marquant. On peut s’y perdre complètement. Mais pour mieux en « profiter », il est préférable d’en comprendre les Arcanes.

Cette réalisation de 1965 n’est absolument pas un thriller ; comme c’est écrit maladroitement ici ou là.

Ce film « chirurgical » est dérangeant par nature, puisqu’il s’agit d’une parfaite immersion dans le monde presque totalement impénétrable d’une des formes caractérisées de la schizophrénie paranoïde. Une pathologie multiforme qui est loin d’être « sympathique ».

La maladie est « signée » métaphoriquement, en ce sens que la belle malade voit presque partout des « apparitions » de fissures, de crevasses, de failles. En effet cette maladie n’est pas celle d’une double personnalité comme on le dit si souvent et si bêtement, mais celle du schizo ( coupure ) et phrên ( esprit ), donc l’esprit fracturé par essence ; pas juste en deux, mais dans une infinité de morceaux.

Bien heureusement, Roman Polanski ne cherche pas à donner des explications ; hormis peut être ce déterminisme déclencheur possible par le viol, passé, présent, futur ou déliré. Mais ceci est plus fantasmatique, qu’acquis et cela n’apporte pas grand-chose. La relation du sexe et de la schizophrénie rentre difficilement dans des cases.

On reste bien dans cette sphère déficitaire pure et dure, pour laquelle il n’est pas si intéressant que cela de convoquer le passé du patient. Il y autant d’explications à cette maladie que de patient. En fait cela reflète de atteintes très diverses, avec des « expressions » très variables, selon les personnes, selon le degré d’évolution… Mais il existe un socle commun :

La désagrégation de la vie psychique. Le syndrome de dissociation.
- trouble du cours de la pensée et du champ de la conscience
- trouble du langage
- altération du système logique
- la désorganisation de la vie affective
- la discordance psychomotrice. Le comportement catatonique.
Le délire paranoïde et l’autisme.

Polanski le surdoué, n’a à peine que 32 ans, dans ce projet hors norme. Il fait de la psychiatrie sans le savoir. Et c’est bien mieux comme cela. En se glissant dans les méandres du personnage, il parvient à rendre « palpable » l’incompréhensible ; à défaut de le rendre « compréhensible ». Il efface en un seul film, tant d’errances des ses confrères réalisateurs.

C’est vraiment étonnant, surtout si comme moi, vous avez visionné, avec un regard de professionnel, tant de films « psy » ratés, fondés sur des a priori de cinéma totalement erronés. Cela correspond à 99 % de la production, c’est dire le désastre. Ce n’est pas anodin puisque cela contribue à une image totalement fausse des pathologies mentales.

Sa Majesté les mouches.

Disons le tout net, le film est épouvantable. Les trois cadavres (deux hommes et un lapin) pourrissent et puent ; alors que Deneuve reste propre un pure un moment. Le contraste voulu est saisissant.

Mais dans l’ensemble, c’est difficilement soutenable. Et les spectateurs qui cherchent une « distraction » se sentiront trompés. Pourtant ils auront droit à une « expérience » profonde.

Catherine Deneuve « est » cette schizophrène. Avec une telle interprétation, l’anodine introvertie est propulsée à des années lumières des Parapluies de Cherbourg ou des Demoiselles de Rochefort.

Tout le monde joue très bien. Y compris l’entourage, avec sa classique incompréhension. La mise en scène est remarquable, tant elle aboutit à une épure. Il n’y a pas de blabla dans cette histoire.

Même les Blue Velvet, les Mulholland Drive… de David Lynch ou les plus tordus des Lars von Trier sont en deçà. Il ne suffit pas d’être soi-même dérangé pour faire un film de fou parfait. Mais ça aide quand même.

L’assassinat de Sharon Tate, sa femme et son enfant à naître, est de 1969. Il complètement idiot de voir dans le film une sorte de prémonition criminelle.