Quand le grand Jude Law nous donne à voir une majestueuse descente aux enfers.
Un film déprimant qui nous tire vers le bas. Et étonnamment c’est bien comme cela. On le doit à un jeune réalisateur américain Sean Durkin (38 ans). Il est manifestement sensible aussi à la culture européenne. Ce qui n’est pas si courant que cela outre atlantique.
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Dans les années 80, un trader américain qui n’a pas mal réussi aux states, tente un gros coup. Il saisit une belle opportunité de big business en s’expatriant en Angleterre.
Sa famille l’accompagne à contre cœur. En particulier sa femme qui était attachée à sa lumineuse maison et à son haras. Elle est jouée par l’américaine Carrie Coon que l’on peut confondre avec Cate Blanchett.
Le chef de famille voit grand, trop grand. Il investit un manoir anglais totalement disproportionné et un brin sinistre. Il achète une grosse Mercedes à sa femme. Elle bénéficie aussi d’un pur sang. Il faudra lui bâtir une remise dans cet immense parc.
Les dépenses s’accumulent. Lui voudrait faire un gros coup en amenant un vieux propriétaire dépassé à vendre sa grosse entreprise de la City. Cependant il n’a pas été engagé pour cela mais pour ses talents de courtier. Le jeune ambitieux (47 ans) pense sincèrement que c’est la seule issue et il envisage de se faire une grosse commission au passage.
C’est un embobineur de première, qui sert à chacune les belles histoires qu’il a envie d’entendre. Son métier est basé sur la frime, la confiance et les coups de poker intelligents. Il est certes très à l’aise quand il manipule les codes US de la réussite, mais il est décontenancé par ces culs terreux d’Anglais, avec leurs curieuses traditions dans leurs affaires. Ce n’est pas un escroc stricto sensu, mais une personnage dont le métier est de prendre de gros risques en étant perpétuellement en porte à faux. S’il réussit, c’est un demi dieu et s’il échoue on dira que c’est une crapule.
Et finalement le vieil Anglais ne sent pas trop la cession de son business. Il laisse filer. Il ne va pas concrétiser la transaction. Et du coup Jude Law se retrouve le bec dans l’eau. Se sentant floué il montre sa vraie nature. Il devient agressif et grossier.
Et assez rapidement tout s’effondre autour de lui. Son capital de sympathie, qui est son fond de commerce, tend à se réduire à néant. Désormais il est nu. Les anciens camarades se détournent de lui. Il est fini.
Et sa femme, qui se rend compte de l’impasse, ne l’aide pas, au contraire. Le climat est atroce. Ses enfants, malheureux dans cette triste campagne, font des bêtises eux aussi.
On leur coupe le téléphone. Il n’a même plus de quoi se payer un taxi.
Complètement perdu et blessé, à la recherche du moindre signe d’affection, il va rendre visite à sa mère qui habite Londres (en vrai, Jude Law est britannique). Il ne l’a pas revu depuis plus d’une décennie. Il ne lui même jamais téléphoné. Elle ne l’attendait pas. L’accueil est froid et même glacial. Il est déjà oublié, enterré. Il n’y a rien à espérer de ce côté là non plus. J’ai vu ce genre de situation avec mes petits yeux. Et c’est vrai que pour vous faire disparaître de leur mémoire, les gens ont parfois besoin de vous haïr.
Le film s’arrête sur une impasse. Jude Law fond en larmes sincères devant ses proches. Et n’a d’issue que de leur proposer de laisser tomber ce mauvais « nid » pour trouver un appartement plus modeste dans la capitale UK. Et l’on ne sait pas si cela suffira à remonter la pente.
Jude Law fait un travail remarquable. Et au-delà de la tristesse sidérante de l’intrigue, il sait impulser quelque chose de très fort et très vrai dans ce film.
https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Nest_(film,_2020)