Situation amoureuse : c’est compliqué ! Film Avis. Résumé. Anaïs Demoustier (2014) 4.5/10

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Ben non, ce n’est pas compliqué. Et c’est bien cela le problème.

Comment faire, quand le cinéma n’a pas d’imagination ?

Il part copier les invariants de ces navrantes comédies romantiques américaines.

Le problème, c’est que les originaux ne sont déjà pas terribles. Alors les copies !

Si déjà on clone, alors qu’on duplique le meilleur !

A ma connaissance, aucun critique n’a compris la ficelle. Preuve que l’industrie US a bien colonisé les esprits.

Des égarés, qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, ont même cru y voir une conception innovante : «  C’est original, c’est différent ! ». Je cite par exemple Ouest-France :« De quoi rafraîchir les conventions de la comédie romantique ». Quelle foutaise !

Il ne s’agit ici que d’une pauvre resucée des thèmes quasi obligatoires, des standards US :

D’abord les scies musicales américaines, qui soulignent l’intrigue de gros traits. On ne risque pas le dépaysement. On est bien dans cette familiarité des films yankee.

Le thème central a déjà été utilisé cent fois là-bas. La retrouvaille « par hasard » de deux jeunes adultes qui se sont côtoyés au collège. Ils ne ne savaient pas alors qu’ils étaient fait l’un pour l’autre. Alors que les spectateurs se rendent compte au premier instant, qu’ils vont finir dans les bras l’un de l’autre. Basse démagogie.

L’hyperbole de la différence. Elle était la plus belle fille de l’établissement, alors que lui n’était qu’une ombre insignifiante. Et on enchaîne les flash back, sur le gamin méprisé par tous et la bombasse qui faisait saliver. A présent, il doit à tout prix se rattraper, pour prouver enfin qu’il est le beau Ken qui peut convoler avec sa Barbie, à la façon d’un vrai G.I. de l’amour (*)

Il faut que la problématique soit bien extrême.

  • On est en plein dans les valeurs américaines de différenciation sociale, vaguement méritocratiques, et qui commencent si tôt dans le parcours des individus.
  • Mais aussi le thème de l’échec « mérité » du timide, qui est l’autre face du « triomphe de la volonté » des présupposés impérialistes.

Le cinéma français des bonnes années, nous avait épargné ces grossiers schémas là.

C’est une comédie de « mariage », ce qui fait 99 % du genre aux USA et 100 % à Bollywood, mais ça c’est une autre affaire.

On a donc toute la panoplie du genre :

L’omniprésence des ces habitudes empruntées de l’autre côté de l’Atlantique, comme ces préparatifs clinquants secondés par les « best men » et les « bridesmaids ».


Et puis il y a ces enterrements de « vie de fille » façon Chippendale avec préservatifs, et de « vie de garçon » façon « putes russes » (dixit) – On n’échappe pas non plus à la limousine de 10 mètres, made in USA.

Et bien entendu le héros qui vient de rencontrer celle qu’il pensait ado, comme étant la femme de sa vie, s’était pourtant engagé avec une autre.

Survient donc l’inévitable thème de la tromperie supposée, et qui bien entendu ne sera jamais consommée. Un traitement directement hérité de feu le code de censure Hays (**)

Une astuce pour relancer les quiproquos et les pseudo prises de tête. On n’échappera pas au final à la confession/déclamation publique du prétendant, qui rentrera au bercail très heureux de devenir le WASP gentil mari., de la plus terne.

Ces relents de puritanisme et cette fausse culture US, puent !

A force de se voir infliger cela, il y a de fortes chances, que les petits Français se mettent à se conformer à ses rites là. Ça commence déjà !

Ils nous ont refilé le père noël rouge Coca-Cola, mais ils ont semble-t-il échoué à transformer le recueillement de la Toussaint en farce grotesque à la Halloween. Sur le mariage préformaté, ils sont en train de marquer des points. D’autant plus qu’il y tout un juteux marketing événementiel à prévoir.

Le film fait plaisir à l’actrice principale, Emmanuelle Chriqui, en décrétant qu’elle est encore plus belle que lorsqu’elle était au lycée. Ce qui franchement peut se discuter. C’est certes une jolie Séfarade, reconnue comme telle, mais qui ne sera pas forcément du goût de tout le monde. On demande pourtant à tous les acteurs mâles de paraître saliver à son passage. Ce qu’ils font avec plus ou moins de conviction, d’ailleurs.

Manu Payet est non seulement réalisateur du film, mais aussi acteur. Il s’est réservé le beau rôle. Moche, poseur et maladroit comme il est, je me demande bien comment il peut séduire si facilement, les deux belles du film, dont l’officielle jouée par Anaïs Demoustier.

Quelques seconds rôles sont habiles, dommage qu’ils n’exercent pas leur talent dans de bons films.

  • La prestation caricaturale du père d’Anaïs, jouée par Philippe Duquesne, ne manque pas d’intérêt. Mais là franchement, on a à faire à un autre style de comédie. Ce bon moment parodique, ne dure qu’un temps.

Le ton « djeun » est vraiment maladroit. Les « canap’ » ou les vêtements de « jog’ » étaient bien inutiles. Ils collent assez mal avec les personnages. Mais ça, c’est un point de vue.

J’adorerais pouvoir défendre le cinéma français actuel. Mais je n’ai que des déceptions.

J’attends toujours cette étincelle, dont on fait les Ostlund, les Lars Von Trier et j’en passe.

Partout en Europe, on trouve du renouveau, des pépites…

Je pense sincèrement qu’il faut avoir la dent dure, exiger au moins quelques miettes de génie. Il n’y au une raison de laisser se propager l’insignifiance de maintenant. Faute de bons auteurs et de bons réalisateurs, il y a fort à penser que le public lui-même, va finir par devenir mauvais. Un triste cercle vicieux en perspective.

Le réalisateur débutant, arrive à bout de son scénario. Mais il y a quand même pas mal de maladresses. Je ne citerais que les « rêves » du héros, où il se voit dans de multiples situations grotesques.

Ce copier-coller servile, heureusement, n’a pas eu trop de succès. Une lueur d’espoir ?

(*) c’est un point de vue de l’amour, celui de Laerte, qui n’est pas forcément le bon :

Laërte -Musset « A quoi rêvent les jeunes filles »

  • Les femmes cependant demandent autre chose.
  • Bien plus, sans les aimer, du moment que l’on ose,
  • On leur plaît. La faiblesse est si chère à leur cœur
  • Qu’il leur faut un combat pour avoir un vainqueur.

(*) Ils vont même plus loin dans l’autocensure que le code Hays : « L’adultère, parfois nécessaire dans le contexte narratif d’un film, ne doit pas être présenté explicitement, ou justifié, ou présenté d’une manière attrayante ».

https://fr.wikipedia.org/wiki/Situation_amoureuse_:_C%27est_compliqu%C3%A9

Luca Canduso
Anaïs Demoustier
Emmanuelle Chriqui

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