Borsalino (1970) 5.5/10

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Le plus surprenant là dedans, c’est le grand écart qu’il existe entre la bonne réputation de ce film et ses maigres qualités.

Ce long métrage a peut être demandé des moyens, mais le résultat est très modeste. Beaucoup a du être investi dans la publicité et peu dans les idées. Les tracas financiers de la production ont fini également par laisser des traces.

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Après s’être mesurés pour les beaux yeux de Lola – l’appétissante Catherine Rouvel – nos deux petits truands Delon et Belmondo vont faire un pacte de non agression. Ils se lient afin de commettre de petits et moyens larcins. A leurs débuts, ils seront commandités pour de l’intimidation et du racket. Et comme les affaires marchent, ils vont monter en puissance. Ils iront jusqu’à prendre possession d’une bonne partie des ressources de la pègre marseillaise. Leur prise de pouvoir est cousue de fil blanc. Je n’y crois pas une seconde. Les « propriétaires » de Marseille n’étaient pas contents non plus de l’image renvoyée par ces deux compères. Ils l’ont fait savoir.

Les caïds que nos deux jeunes premiers vont déloger, sont des caricatures balafrés du genre.

Les femmes qui sont souvent ici des pas grand chose, sont traitées comme des moins que rien. Les féministes vont hurler. J’adore quand elles prennent cela au premier degré et quand elles se vautrent dans l’anachronisme.

Alain Delon n’hésite pas à mettre sa compagne officielle Mireille Darc sur le trottoir. Ces courtes apparitions en putain des rues est bien entendu un agréable clin d’œil.

Comme la réputation des deux acteurs est en jeu, ils agissent avec un certain panache et sans violence gratuite. Les bandits flamboyants avaient la côte jadis. Pas de raison de coller à la réalité sordide.

On assiste à un défilé de mode sur le thème du costume trois pièces. Ils sont tellement voyants que c’est contre productif. L’habit ne fait pas le moine, mais cela leur donne tout de même une belle image de prospérité. Ce qui devait les déguiser en notables leur donne des airs de maquereaux puissance dix et/ou de mafieux d’opérette. Difficile de passer inaperçu. Plus apprentis qu’affranchis !

Les belles voitures de la belle époque sont bien mises à contribution. C’est un régal de voir ces beaux engins en parfait état de marche. Et ils ne s’en servent pas avec modération.

Ce revival des années folles à la fin des années 60 est un phénomène connu et étudié. Cela correspond au retour cyclique, d’une période exagérément insouciante, précédant une crise. Claude Bolling est chargé de mettre cela en musique. Pénible à la longue !

La confrontation amicale des deux têtes d’affiche est sympathique. Mais cela s’arrête là. Delon étant le producteur, il aurait pu être tenté de ramener la couverture à lui. Il s’en est bien gardé. Jusqu’à l’affaire de l’affiche.

L’empathie va davantage vers Belmondo. Son rôle de dandy dandy-malfrat colle assez bien à ce qu’on attend de lui.

Delon a souvent le regard vide. Il semble moins à son aise. On est loin de sa belle forme dans Le Guépard ou dans la retenue intelligente de La Piscine. Mais cela est du en grande partie à ce scénario simpliste et qui n’intéresse pas plus que cela.

L’Incorrigible – qui n’est pas ici celui qu’on croit – va quand même nous montrer qu’il parle bien l’italien. Alors qu’il est au sommet de la pyramide du crime, il souligne, références savantes à l’appui, qu’il s’y connaît désormais en art. Un peu too much pour un simple repris de justice, qui était jusqu’à présent très basique. Ce n’est pas encore Monsieur Klein (1976).

Les deux acteurs vont se brouiller pour de vrai pour des questions de préséance. Pas question de régler ses comptes aux coups de poing spectaculaires comme dans le film, et donc l’affaire ira banalement jusqu’au tribunal.

Le célèbre acteur de porno « Rocco Siffredi » s’inspirera du nom pris ici par Delon. C’est vous dire le niveau.

Michel Bouquet fait un petit numéro de politicien corrompu.

Jacques Deray est très loin de sa sublime réalisation La Piscine en 1969, juste un an avant. Avec Borsalino il a obliqué dans le genre bien moins exigeant du film alimentaire et grand public.

Ce n’était pas la peine de convoquer le grand Jean-Claude Carrière et quelques autres pour les dialogues. D’abord le texte est réduit au minimum. Ensuite, il n’est pas chargé de véhiculer de grandes pensées.

La fin est une queue de poisson tellement énorme, qu’à elle seule, elle est susceptible de boucher le port de Marseille.

Deux heures de ça, c’est vraiment trop long.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Borsalino_(film)


Alain Delon

Jean-Paul Belmondo
Catherine Rouvel
Michel Bouquet
Daniel Ivernel
Envoi
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