Les Fantômes du chapelier. Avis film et livre. Serrault, serial killer 8.5. Chabrol étrangle Simenon 6/10.

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Les_Fantômes_du_chapelier est avant tout un livre de Simenon. Il faut garder cela en tête pour mesurer le gap avec le rendu filmé.

Chabrol s’est emparé de cette brillante histoire, mais en a fait un film déséquilibré. Les propositions sont bizarrement équidistantes, sans trop de différence entre le bien et le mal, au point que cela peut même sembler rigolo par moment.

Avec cette mise en scène peu impliquée, on ne voit plus très bien qui craint qui et qui sait quoi.

Quand on vient voir ce film, on sait d’emblée que c’est une histoire de criminel en série.

Mais ici, le début laisse planer le doute sur le coupable.

Chabrol semble vouloir nous mettre devant un choix.

Qui du chapelier ou du tailleur Kachoudas est le coupable ?

Ce n’était pas prévu comme cela.

Micro suspense de micro papier.

Le coup du morceau de lettre anonyme coincé dans le pantalon de Serrault et découvert par Charles Aznavour, n’est pas très démonstratif à l’écran. C’est vraiment ici un détail assez inoffensif. Il n’y a pas de quoi semer la zizanie et avertir les flics. En tout cas, dans la relative insignifiance où cela nous est montrée.

Le doute est mince depuis le début, puisque l’un et l’autre sortent toujours en binôme, comme s’ils se surveillaient mutuellement. Déjà il n’en reste que deux à soupçonner.

Or Aznavour sait lui qu’il est innocent. Il n’en reste qu’un. C’est forcément Serrault, l’homme au chapeau, le suspect.

Pour en arriver là, on a plus besoin de ce minuscule bout de papier. Ce qui était au centre du livre devient, une minuscule saleté qui peut facilement s’éliminer et qui ne prête plus trop à conséquence.

Aznavour menacé par Serrault ou crainte d’ostracisme ?

C’est la même imprécision quant à l’attitude d’ Aznavour. Le scénario paraît nous dire que que l’Arménien se tait juste parce qu’il se sent bien ici et qu’il ne veut pas faire de vagues. En clair il ne vendra pas la pêche car on chasse le “porteur de mauvaises nouvelles“.

C’est une thèse assez médiocre et peu convaincante.

Le roman mentionne qu’Aznavour la ferme, car il craint pour sa vie. Ce qui est plus convaincant mais change pas mal de choses. Il faut mettre en scène les craintes et les évitements de manière plus ordonnée. Mais cette feignasse de Claude Chabrol nous prive de ce deuxième suspense inquiétant.

Il va même carrément dans l’autre sens, avec un Serrault attentionné qui protège le malheureux Arménien et l’assiste dans sa maladie jusqu’à sa mort. Entre temps il en fait même un confident. Il déballe toutes ses histoires de meurtres.

Ce film ne marche pas sur ses deux pieds.

Alors, on laisse Chabrol de côté.

La réalisation n’est pas mauvaise. Il y a de bonnes idées. Mais comme on vient de le voir, je l’accuse quand même d’un certain sabordage. Son projet « différent » paraît rafistolé. On ne joue pas avec une si belle mécanique. Il n’est pas toujours très sérieux le Glaude.

Il nous reste Simenon et Serrault. Grâce à cette donne, le long métrage est sauvé.

Serrault est tout bonnement exceptionnel, dans son interprétation d’un homme progressivement coincé dans un drôle de micmac. Il nous fait un numéro brillant pendant ces deux heures.

C’est quasi un one man show. D’ailleurs, le plus souvent il se parle tout seul et sourit dans son coin. Lui il sait. Cela l’étonne lui même. Cela l’amuse. Il voit les piétinnements de l’enquête grâces aux rapports de comptoir. Il a plaisir à travailller son imagination pour de faux dialogues avec sa femme en mannequin de plastique. Pour passer, il donne des coups à cette chose dérisoire.

Et quand il est en société au bistrot avec ses copains, il joue encore un beau rôle de composition.

Et dehors, dans ces ruelles sombres et mouillées, quand il pérégrine avec son toutou Aznavour, il joue encore, avec les mains, avec les bras. Il s’amuse de lui au bistrot dans ce jeu pervers du “tu sais mais tu ne peut rien dire”.

Un véritable régal pour ce qui est assurément une fine improvisation. Serrault a du s’exercer aux meurtres, pour obtenir un tel niveau de conviction, façon Actor Studio.

Il y a des centaines de nuances dans son interprétation, accompagnées de centaines d’heureux détails.

On reste cloué au sol, car on est tout bonnement fasciné par tant de talents. On en redemande encore et encore.

Intrigue à découvrir dans le lien suivant :

Récit et avis in extenso avec ce lien là : Les Fantômes du chapelier. Film. Chabrol étrangle Simenon 6/10. Serrault, tueur en série 8.5. explication + scénario.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Fantômes_du_chapelier

https://fr.wikipedia.org/wiki/Les_Fantômes_du_chapelier_(film)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Psychose_(film)

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