Monsieur Verdoux (1947) 6.5/10 Charlot tueur en série. Bazin amnistie !

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Nous avons la chance d’avoir dans notre patrimoine national des criminels célèbres, comme Landru et le Docteur Petiot. Et grâce au ciel leur histoire est très romanesque… et donc filmique.

Les Américains, qui ont gardé longtemps une image flatteuse de notre pays, ne manquent pas de rendre hommage à nos “grands hommes”.

Et dans cet opus, Charlie Chaplin s’inspire de landru, ce génie malfaisant avec ce Monsieur Verdoux. Il n’y pas de doute, il tue des femmes, ils les volent et cela se situe à Paris. On entrevoit même un sinistre poele dans un plan.

Ce triste sire est bien idéalisé. Il sait parler de Schopenhauer, il est délicat avec ces dames. Il peut même être généreux et touchant à ses heures. Un vrai gentleman à la française. Charles Boyer, le gaulois préféré outre atlantique, aurait bien convenu comme interprète.

Mais ici c’est Charlot lui-même qui s’empare du rôle. Ce qui pose d’ailleurs problème(s).

  • D’abord cela ne colle pas trop à l’image sympathique qu’on a de lui. Mais cela c’est un obstacle que de nombreux comiques ont su franchir. Certains se sont même révélés très bons.
  • Ensuite, il ne peut s’empêcher de faire quelques gags et cela tombe singulièrement à plat dans ce contexte qui ne prète pas à rire. Cette « Comedy of Murders » fait le grand écart entre la tragédie et la comédie. Cela ne lui réussit pas tant que cela. Il aurait du rester borderline, avec une dose de badinerie amusée.
  • On peut lui reprocher aussi de tirer l’histoire vers l’anecdotique. Comme par exemple ce plateau contenant un verre empoisonné et un verre sain, et qui tourne sur lui-même de manière trop opportune. Là on est dans du sketch des premiers temps du muet.
  • Enfin il a cette mauvaise idée d’en faire un tribunal de la société et de la justice. Il faut dire que lui même était dans les collimateurs des bien-pensants aux USA. C’est cette posture qui vaudra le repêchage idéologique du film par certains intellos d’ici.

Mais de manière générale, sa prestation en tant qu’acteur n’est pas mauvaise. Grâce à ce rôle étonnant, on lui voit des nuances nouvelles. C’est sans doute ce qu’il voulait se démontrer à lui même, déjà.

Et puis le film se laisse regarder.

Étonnamment les Gaulois, généralement méfiants et réfractaires, lui ont pardonné ces faiblesses. Ce fut un grand succès en salle ici. Des critiques, non des moindres (Truffaut !), ont crié au génie ! Il y en a qui adore nager à contre-courant. André Bazin, le mentor de Truffaut, écrit des lignes ambiguës mais intéressantes sur le raté/réussi du film “Verdoux c’est Charlot déguisé en son contraire” : andre-bazin/monsieur-verdoux

André Bazin

Je pense pourtant que si Chaplin avait été au bout de sa démarche et qu’il avait commis un Landru mondain, doué et sans artifices, il aurait pu donner un spectacle de très au niveau, sans jouer à cache-cache avec son contraire.

Ce fut son dernier film.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Monsieur_Verdoux

(*) https://fr.wikipedia.org/wiki/Yvan_Keller

Pour l’Allemagne au vingtième siècle, il y a quand même le recordman Bruno Lüdke avec plus de 80 femmes assassinées

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