Avis film muet. Quatrième Alliance, Dame Marguerite. Dreyer. 7/10

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En matière d’art, que ce soit il y a 30.000 ans, 5000 ans ou maintenant, l’homme avait toutes les cartes en main. On le sait, son cerveau n’a pas bougé. C’est pourquoi on peut se permettre de critiquer un film de plus de 100 ans avec nos repères actuels. En tout cas pour les grandes lignes.

La Quatrième Alliance de Dame Marguerite, film suédois de 1920, est de Carl Theodor Dreyer, un réalisateur danois dont le nom vous dit forcément quelque chose. Oui, c’est celui de La Passion de Jeanne d’Arc 1928 avec la Renée Falconetti aux cheveux courts.

Techniquement le long métrage est bon. Les objectifs et la pellicule rendent bien l’intéressant décor champêtre. Les maisons, le mobilier ouvragé en bois, méritent à eux seuls le coup d’œil. Je serais du métier, je m’empresserais d’en récupérer les modèles.

Les 3 acteurs principaux font correctement leur besogne.

Hildurg Carlberg incarne la vieille Dame Marguerite, mi-sorcière, mi-patronne à la dure et mi-bienfaitrice de l’humanité. Ce qui fait beaucoup de « mi », mais elle assume. La brave actrice est née en 1843 à Stockholm, ce qui lui fait alors 77 ans ! On peut vraiment dire qu’elle incarne bien ce personnage évolutif. D’abord en tapinois, alors qu’elle va circonvenir le jeune premier Einar Rød, avec sans doute l’aide de la pharmacopée magique. Puis en toute puissance, une fois le petit pasteur dans la nasse. Elle se permettra même une belle remise à sa place de ce gaillard qui se révolte, à l’aide d’un de ses massifs employés (tout en bois moussu, selon les intertitres). Enfin, elle sera très bienveillante sur le tard, vue que sa propre histoire est à l’image de celle du jeune couple réduit à se faire passer pour frère et sœur.

Les membres de la communauté sont autant de caractères. Ils et elles ont des gueules… à faire peur parfois.

L’astuce du film consiste à montrer comment un postulant pasteur qui n’a rien à manger et qui est accompagné de sa promise, va être contraint de marier la très vieille femme de son prédécesseur, s’il veut le poste. Elle elle veut rester dans les meubles et diriger la maisonnée. Pas question de « consommer ». Or pour petit prélat et sa fiancée Greta Almroth, le besoin du poste est vital, au sens premier du terme. Ils pensent s’en sortir comme dans un viager facile, en spéculant sur la mort prochaine de la vieille. De bien mauvaises pensées pour un pasteur. Mais Dame Marguerite avait fait de même à son époque. Elle a pu réintroduire en tant que mari son jeune soupirant, une fois que le vieillard qu’elle était obligée d’épouser ait rendu l’âme.

Mais Dame Marguerite a tendance à durer comme dans le film Le Viager avec Michel Serrault ou dans un duplex pour trois. Ce qui fait que les jeunes commencent à imaginer des ruses pour hâter la fin. Le pasteur tentera même de l’effrayer avec un déguisement diabolique. Mais la vieille comprendra vite la supercherie et en rira.

Tout se termine bien. Hildurg se prend de compassion pour les jeunes et se dépêche de mourir dans une ambiance d’amour et de pardon.

Il y a quand même un truc qui me chipote. Comment peut-on mentir à ses paroissiens en faisant passer sa maîtresse pour sa sœur, puis se marier avec elle une fois la situation solutionnée, comme si de rien n’était ?

Dommage qu’on n’ait pas adjoint de musique. D’autres restaurations ont su le faire.

https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Passion_de_Jeanne_d%27Arc

https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Quatri%C3%A8me_Alliance_de_Dame_Marguerite

https://fr.wikipedia.org/wiki/Carl_Theodor_Dreyer

https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Viager

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