Bardem Entre les jambes d’Abril. Film sexopathe. Thriller raté. 6/10

Temps de lecture : 4 minutes

Avec un titre pareil, calqué sur le titre espagnol, on ne peut être plus clair. C’est bien des allers retours à l’Origine du monde, façon Courbet, dont il s’agit.

On constate rapidement que Javier Bardem (30 ans) cherche à s’établir « Entre les jambes » de Victoria Abril (40 ans). Une situation qui leur va particulièrement bien, puisque ces deux grands acteurs sont connus pour leur redoutable sex-appeal. En 1999 ils étaient particulièrement en forme.

C’est bien plus un film d’émotions, de passions, de pulsions sexuelles, qu’un film de raison. On le comprend vite.

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L’intrigue pleine de pathos est passablement torturée. Ce n’est pas le premier long-métrage qui mélange les flash-back, les fantasmes, un certain onirisme, la franche fiction et la réalité.

Mais il faut bien reconnaître qu’ici, ce mélange sulfureux n’est pas réalisé avec ce minimum de cohérence et d’explications, dont on aurait besoin. La licence poétique a bon dos.

Même les plus malins d’entre nous, serons vite déroutés et se contenteront de ces séquences hyper sexualisées, qui monopolisent, voire encombrent, l’attention.

S’il n’y avait pas ces grands acteurs pour servir ce film, l’ensemble semblerait vraiment dérisoire.

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Il y a bien trop de policiers dans ce thriller policier. Je m’explique. Les policiers sont ici impliqués sur plusieurs plans. Et dans leur vie affective, de par la fragmentation de leur couple et leurs énormes problèmes. Et dans l’imbroglio criminel concernant deux meurtres. Et il faudrait qu’il soit en plus des juges de paix, des arbitres.

On ne sait plus à quel saint se vouer. L’un d’entre eux est fait cocu par Bardem. L’autre va tuer la femme qui l’a quitté. Trop c’est trop.

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Les scènes de cul mimées sont torrides et bien faites. Abril cultive un côté HotWifeRio. Ce n’est pourtant pas l’érotisme au premier degré qui importe le plus, mais l’enchaînement savant de désirs, de passions, qui mènent à la « conclusion ».

Et puisqu’on est sur du « caliente », ne vous laissez pas avoir par la belle Azucena, celle des toilettes. C’est joué par Víctor Rueda, un efficace travelo. Autant le savoir avant de s’emporter.

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L’innocence que lui prête lourdement le film, fait de Bardem un suspect. C’est la dure loi des longs thrillers qui fait cela. Plus tu parais innocent, plus t’aura de chance d’être coupable. Et donc ce n’est pas trop une surprise de « suggérer » (s’agit-il encore d’une projection fantasmée?) qu’il serait le responsable d’un des assassinats. Puis il aurait disposé le corps dans le coffre d’une bagnole déglinguée qui traîne dans un parking.

On passe de l’angélisme d’un sexopathe en repentir, à la plus profonde perversité, puisque en pleine conscience, il aurait emmené Victoria dans cette voiture pourrie, ouverte aux vents, afin de la sauter violemment.

Mais surmontons ce « détail ».

Ce qui est plutôt mal fait, c’est l’enchaînement dans sa tête qui l’aurait poussé à ce crime « instinctif ». Certes la victime était un travesti, qu’on pouvait vraiment prendre pour une femme. Certes, l’ultra viril Bardem l’a découvert alors que ce personnage grimé le suçait.

Cela nécessite pas forcément de lui fracasser le crâne.

Et puis les concepteurs se chargent de faire encore plus compliqué. La victime serait justement ce scénariste qu’avait négligé le « lecteur » de script Bardem. Ce taureau des îles Canaries n’aurait pas su reconnaître le grand talent littéraire du gracieux homosexuel. Ce talent serait auto-validé par le fait que de nombreuses scènes du film en seraient inspirées.

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On a un mal fou à suivre. Ce scénario est bien trop torturé. Cette complexité devient très difficile à croire. Ce clafoutis bizarre tient de la surenchère de scénaristes un peu largués. Ce qui ne devrait pas nous étonner. Lorsque que des scénaristes mettent des scénaristes dans leur film, c’est qu’ils sont proches de la panne.

Dommage, car en remettant de l’ordre dans tout ça, en coupant quelques branches, on aurait pu arriver à quelque chose de convaincant.

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La composante criminelle fait qu’on est passé de l’autre côté. Alors qu’en soi, cette sexualité sauvage n’est pas forcément une maladie et mériterait mieux que cette médicalisation.

D’ailleurs cette réunion d’obsédés sexuels n’est pas si crédible que ça. Quelle est réellement l’intention des concepteurs de ce film ? Celle de moraliser la sexualité, en la ramenant à l’amour ?

C’est la piste à privilégier, puisque les deux délinquants sexuels vedettes, font certes du sexe débridé, mais ils se réfugient quand même dans les bras l’un de l’autre, comme des petits oiseaux amoureux. On voudrait qu’ainsi on les estime guéris.

Les malades du sexe existent, on ne peut pas le nier. Surtout lorsque l’on sait qu’ils peuvent arriver à des crimes. Mais pourquoi faudrait-il que le sexe non traumatisant, librement consenti, soit canalisé par des règles morales ? Alors qu’il y a une beauté dans ce jaillissement qui frise les limites. Et que son contraire, la rétention triste et la frustration sexuelle, n’est pas bien reluisant. Il y a quelque chose de morbide dans ce nihilisme ascétique (cf Nietzsche).

La musique est omniprésente et elle n’est pas mauvaise. Mais plutôt que d’être juste suggestive, elle devient rapidement comminatoire.

Conclusion. Tout le paradoxe de ces films réside dans le fait qu’on est très copieusement servi et que pourtant on reste sur sa faim.

Et là j’entame mon complet sur le marasme du cinéma actuel. Confer ce lien : marasme-du-cinema-actuel-artisans-imbeciles-contre-artistes-mauvais-exemple-francais

https://fr.wikipedia.org/wiki/Gustave_Courbet

https://fr.wikipedia.org/wiki/Entre_les_jambes

https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Origine_du_monde

https://fr.wikipedia.org/wiki/Javier_Bardem

https://fr.wikipedia.org/wiki/Victoria_Abril

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