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Etude en plusieurs épisodes de La Création de Haydn, sur la base de la prestation de Jordi Savall – Yeree Suh (soprano), Tilman Lichdi (ténor), Matthias Winckhler (baryton); La Capella Reial de Catalunya ; Concert des Nations.

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Qui l’eût cru !

Voilà que je me passionne pour l’oeuvre la plus créationniste qui soit, ce Big Bang biblique totalement irraisonnable mais vraiment impressionnant.

Selon la formule habituelle, si je devais emporter une seule œuvre sur une île déserte, ce serait sans doute celle-là.

Je peux même transposer dans un régistre plus prévisible. Si l’on doit mettre une bande musicale lors d’une cérémonie après ma mort et bien que ce soit ce début de La Création et ce jusqu’à la rupture grandiose du fisternis. C’est un petit jeu d’esprit, car en fait je ne souhaite pas de cérémonie posthume. De toute façon ne comptez pas sur moi pour que mon fantôme vienne écouter.

Et donc aussi incroyablement que ça paraisse, pour un athée comme moi, la conclusion serait laissée à la croyance la plus incroyable qui soit.

Pas qu’un ultime doute me prenne « par précaution » au dernier moment ; façon pari de Pascal. Non, vous devez plutôt le voir comme une réaction malicieuse envers ce début des temps, conçu comme un pur produit irrationnel. Et ces images d’Epinal agréablement colorées, contrastent bien avec cette parenthèse suspendue qu’est ce monde infiniment grave, tel qu’entrevu lors de notre court passage ici bas.

Et même si ce n’est que la musique que d’une sphère, cela résonne bien avec le grand ballet des sphères en général ; celui dont on dit qu’il est conçu et synchronisé par un Grand Architecte. Ce dont on peut douter également.

Cette musique ne transformera pas l’athée en croyant. Mais elle lui fera goûter de cette « magie » dont est capable l’homme. En fait c’est de l’art au sens le plus noble du terme, c’est à dire quelque chose qui se situe aux portes de la perception. « Et j’ai vu quelquefois ce que l’homme a cru voir ! » nous dit Arthur Rimbaud étrangement visionnaire sur le coup.

Rarement le microcosme a été autant raccord avec le macrocosme. Ou plutôt l’inverse puisque c’est du macrocosme que le musicien nous parle et ce macrocosme illumine totalement notre microcosme bien à nous. Il nous permet enfin de sortir des vétilles de l’ordinaire.

Mais bien sûr cette illumination ne dure que le temps d’une chanson. Seul les fous et les mystiques continueront à être ou à croire être toujours irradiés.

C’est ce hiatus entre ces instants magiques et ce qui devient à la longue la perpétuation plan-plan du souvenir, qui rend souvent les messes si emmerdantes. Il faut entendre ces curés qui chantonnent si petitement, pour avoir une idée de ce gouffre insondable entre les vrais moments de grâce et le service minumum de la continuité rituelle. Laquelle tient plutôt de la lassante routine ménagère. Tiens je vais sortir les poubelles, c’est le jour et l’heure…

Peut-il en être autrement ?

La vision du « Poème De la Mer, infusé d’astres, et lactescent », c’est l’exception. Ce n’est pas du ressort du quotidien. Rimbaud avait bien compris les limites de ce « coup d’éclat permanent », quand il a considéré qu’il valait mieux ranger ses crayons.

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Par analogie – de retour sur terre – si vous mettez le DVD de la création de Haydn du soir au matin et tous les jours de surcroit, il y a très peu de chance que le miracle se produise encore et encore.

En fait la kryptonite qui est en nous, ne peut s’éclairer que rarement et sous certaines conditions. On ne triche pas avec ça. Ces drogués qui tendent à la surexploitations de leurs mines intérieures, créent une dette, que rapidement ils n’arrivent plus à payer. Et les stocks sont alors à zéro.

Pour parler autrement. Dans ces épisodes de bonheur culturel, il y a du savoir, il y a de la connaissance, il y a de l’apprentissage et de l’initiation, il y a des qualités qui sont en soi… mais il y a aussi une forte composante liée à l’économie de nos neurotransmetteurs. Du coup on peut ranger ces expressions artistiques religieuses, dans un plus petit tiroir.

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Un enregistrement, disponible en numérique, a eu lieu, avec une configuration proche, dans le château de Cardona, située dans la Catalogne natale de Savall – Et même si l’interprétation et la direction sont également brillantes, il y aurait parait-il des problèmes de locaux réverbérants et de prises de son.