Crépuscule à Tokyo. Ozu psychologue. Famille, je vous hais. 8/10

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Une sélection de films de Yasujirō Ozu et une introduction à son cinéma, se trouvent à ce lien :

Crépuscule à Tokyo est à nouveau un film qui dissèque la méandreuse cellule familiale. Ici l’intrigue démarre fort, du fait de l’absence de la mère et de lourds soupçons d’abandon la concernant. C’est un spectre quasi psychanalytique aux lourdes conséquences. Et donc tout va finir par éclater tellement les blessures sont profondes.

Ozu n’a pas pu éviter une sorte de déterminisme atavique dans cet enchaînement/déchaînement de causes menant au drame. En tout cas, on y trouve un profond questionnement à ce sujet.

Chishū Ryū incarne une fois de plus le père digne et esseulé. Isuzu Yamada est la mère qui a déserté le foyer pour se livrer à ses turpitudes. Elle est maintenant de retour discret à Tokyo. Elle manage un petit centre de jeux. Là les gens causent et se moquent.

La belle Ineko Arima est une des deux filles de Ryū. La plus jolie, la plus désirée et celle qui a le moins de francs repères. L’autre est Setsuko Hara qui a du fil à retordre avec son mari. Elle est venue avec sa petite fille se réfugier chez son papa. Ici elle tente de maintenir l’équilibre de la proto cellule familiale. Tant qu’elle reste ici, elle assume tant bien que mal, de jouer le rôle d’une seconde mère.

La pauvre Ineko se questionne sur sa vraie parentalité. Bien qu’on ait cherché à lui dissimuler qui était sa mère, elle arrive à la retrouver. Dialogue de sourd. A sa demande, sa mère lui assure que ce père qui l’a éduqué est son vrai père ; mais elle ne la croit pas vraiment. Elle méprise sa génitrice qui s’est si peu occupée de ses filles. Elle est profondément déboussolée.

Conséquence supposée de cette dislocation parentale, elle s’est laissée berner par un lâche, qui l’a engrossé. Il fait tout désormais pour l’éviter afin de fuir ses responsabilités. Elle tente de le retrouver à tout prix, en parcourant des bouges et autres établissements de la précarité. Elle échoue et se décide d’abord par avorter. Mais la blessure est immense et une fois qu’elle aura compris que son amant est un sombre tricheur à gueule d’ange, elle ira se suicider sous un train ; pas gai !

Une fois le traumatisme digéré, certaines choses finiront par rentrer dans l’ordre. La mère fautive quittera Tokyo, tout en gardant son cap. Setsuko retournera à son mari. Chishū Ryū dont on pensait qu’il serait bouleversé par la proximité physique de son ex épouse, et par le décès tragique de sa fille, ne perdra pas le nord.

C’est un élégant puzzle Setsuko Hara qu s’étend sur 140 minutes. Les morceaux se mettent en place de manière progressive et implacable. Le propre de Ozu est de prendre le spectateur pour quelqu’un d’intelligent. Et donc il donne à réfléchir au fur et à mesure, tout en indiquant les grandes lignes, lorsqu’il le faut.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Cr%C3%A9puscule_%C3%A0_Tokyo

Une sélection de films et l’introduction au cinéma de Yasujirō Ozu se trouvent à ce lien :

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