Film Cukor. Vacances. Avis. Acteurs et psychologie. Hepburn, Grant. 8/10

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Il faut reconnaître de la subtilité et de la psychologie dans les caractères principaux. Les deux personnages principaux sont tellement vrais qu’on pourrait croire à un miracle. La maîtrise de Cukor est absolument extraordinaire. Foi d’un critique, qui déteste les superlatifs !

La déviance symbolique de cette gosse de riche, qu’incarne Katharine Hepburn, est « psychiatrisée » par sa famille. C’est la version crédible, portée par son entourage corseté et dévoué à la grande entreprise. C’est osé de mettre l’actrice la plus oscarisée au monde dans cette petite case. D’autant plus qu’il y a toujours une lueur un peu folle dans le regard de la redhead (rousse). La grande Katharine excelle dans ce rôle, dans lequel elle peut donner des arguments en faveur des deux thèses opposées. Elle ne respecte pas les rites familiaux et cela peut nous heurter. Elle se montre insoumise, car elle étouffe. Et cette grande bringue risque d’y perdre sa santé. Elle est même au bord du suicide. Mais la bonne société ne peut le comprendre. Et pourtant la lady aspire à être conduite par un homme à sa hauteur.

Cary Grant est éblouissant. Il est bien plus ici que le rigolo de service. Son indéniable intelligence, sa grande efficacité dans le monde de la finance, se double d’une très grande sensibilité. En ce qui concerne les sentiments, il est plus au diapason avec Hepburn qu’avec Doris Nolan, la sœur dans le film de la Katharine. Cette dernière étant la femme qu’il convoite à l’origine. Et pourtant il ne s’en rendra compte que tard, qu’il y a bien mieux qu’elle. Et à partir de ce constat, il veillera à ce que ce soit l’ex promise Doris qui fasse les premiers pas … en arrière. Elle le déliera ainsi de son engagement. Grant n’est donc pas juste un animal sauvage, qui ne veut pas être asservi.

D’autres acteurs complètent bien le tableau. Ce qui donne à l’ensemble un aspect panoramique de la comédie humaine. On peut citer le père potentat Henry Kolker qui est capable de certaines adaptations sous réserve qu’on conserve le cap principal. Or son futur gendre Grant, oscille en fonction des arguments des uns et des autres. Alors qu’il est prêt à accepter un « emprisonnement » dans cet univers du pognon, le jeune se cabre. Henry n’a pas su tenir sa langue et recommence à vouloir tout régenter, y compris pour la maison et le voyage de noces, en prévision.

  • J’ai connu dans ma vie de telles fortes têtes. Et c’est vrai que c’est un enfer pour l’entourage, mais que ce n’est pas simple pour eux non plus. Les grandes fortunes tendent à se fragmenter si le capitaine n’y met pas bon ordre. Et il arrive que cette fin de la conservation patrimoniale, finisse par justifier tous les moyens.

Edward Everett Horton est l’image même du professeur de gauche. Il se soucie de la culture et de la connaissance, bien avant les richesses. Plus tard certains de son espèce deviendront franchement woke.

Il y a aussi Lew Ayres, le fils qui sombre dans l’alcoolisme totalement détruit par l’immense ombre paternelle. Un type assez courant si l’on en croit les journaux people.

Et puis Henry Daniell, cette sorte de lord anglais hautain, est ici un aristocrate de la finance totalement intéressé et fort partisan des rites discriminatoires de la haute société. Les plébéiens US n’ont jamais aimé la morgue hautaine de cette caste britishisée. Dans le film, une allusion à l’appartenance au national-socialisme de ce type est assez évidente. En 1940, l’acteur non rancunier, fera Joseph Goebbels dans le Le Dictateur.

***

Une fois qu’on se débarrasse de ses conventions de cinéma qui encombraient l’époque, il reste une caméra très psychologique très fine et qui sait parfaitement épouser les méandres des sentiments. Je me permets de le répéter, le travail est remarquable et les acteurs sont méritants.

Cary Grant a là un de ses rôles les plus intéressants. Notre amie la rousse est excellente également. Mais on ne peut s’empêcher de la voir en filigrane, dans sa très lointaine fin de sa carrière, dans cette épouvantable maladie qu’est Alzheimer. Pas qu’il y en ait les prémices, bien au contraire. Elle est au sommet de sa forme. Mais simplement que son visage si expressif et qui semble parfois nous implorer, ne change pratiquement jamais tout au cours de sa carrière. Et donc on y voit tout déjà, nous qui connaissons la fin de l’histoire.

La critique a été unanimement flatteuse et pourtant le public n’a pas tellement apprécié cette œuvre New Deal.

Continuez la réflexion ici :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Katharine_Hepburn

https://fr.wikipedia.org/wiki/Vacances_(film,_1938)

https://en.wikipedia.org/wiki/Henry_Daniell

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