Kaamelott. Alexandre Astier. Arthur, légende et trivialité. 8/10

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Il est très difficile d’expliquer pourquoi la série Kaamelott est susceptible de plaire autant.

Une partie du charme tient sans doute au filmage soigné et au format resserré. Et puis c’est presque une affaire de famille.

Alexandre Astier est à la fois un concepteur, le réalisateur et le comédien principal. Il a donc toutes les cartes en main. Et comme ce jeune monsieur fourmille d’idées, il peut créer comme il veut. Il a juste délimité quelques axes, qui se veulent inspirés du récit princeps.

Chaque épisode s’inscrit dans une vaste saga, qu’on peut ou non avoir envie de découvrir. On apprendra ainsi ses origines, son passage à Rome, sa prise de pouvoir comme roi, son abdication et j’en passe. Et finalement on peut prendre toute pièce du puzzle indépendamment l’une de l’autre et commencer à reconstituer ce qu’on veut.

Chaque membre de sa « famille » est présenté avec un même soin. Les caractères sont bien délimités et finalement assez complémentaires. Il y a un mélange de ce qu’on peut imaginer de rudesse et de violence pour l’époque, avec ce fin vernis de civilisation que notre roi Astier propage, presque malgré lui.

Le roi Arthur est assez dépité. Il ne se sent pas à la hauteur de sa tâche. Peut-être sait-il dans cet opus, à cheval sur notre contemporain, que le Saint Graal n’existe pas. Pourtant, le récit contrebalance ce doute profond, avec la réalité supposée d’Excalibur. Pour aussitôt après l’instrumentaliser comme un objet de pouvoir corvéable à merci. Le roi retire et replante pour raviver l’attention des bretons. Et même ce jeu finit par le lasser. Y croire ou non, telle est l’ambiguité voulue par les auteurs. Un pied dedans, un pied dehors.

Quelques rôles sont plus comiques que d’autres et viennent à contre-courant des légendes. Ainsi Merlin interprété par Jacques Chambon a plus les pieds sur terre que d’autres mages encore capables de magie. C’est l’irruption du rationnel dans ce qui ne l’était pas.

Les jeunes femmes sont le plus souvent contraintes, comme on peut le supposer qu’elles le furent à l’époque, mais elles ont quelques degrés de liberté.

La reine Guenièvre est une gourdasse, mais c’est la femme légitime d’Arthur. Là encore on mélange tous les codes. Ce n’est plus la vénérée « Guinevere Had Green Eyes » si bien référencée par David Crosby du Crosby, Stills & Nash, mais une sorte de « ménagère » conventionnelle. Elle se plaint du manque d’assiduité et de considération de son mari. Et bien sûr, elle ne fait pas rêver. Il n’y a guère que le curieux Lancelot du Lac / Thomas Cousseau pour s’en satisfaire. Voilà les risques, quand on rêve trop et qu’on ne fait pas assez.

Les plus vieilles, souvent en position de pouvoir, en font voir de toutes les couleurs à Arthur. Là encore le fléau de la balance est au milieu. Au centre d’une porteuse indécision.

Les dieux pourraient exister, mais ne se manifestent que par une intermédiaire peu reluisante, La Dame du Lac / Audrey Fleurot. Comme ils ont été incapables de choisir mieux, ils ne sont pas trop à prendre au sérieux. Le cul entre deux chaises, une fois de plus.

Léodagan de Carmélide, le beau-père, n’est autre que le vrai père d’Alexandre, Lionnel Astier. Ce qui a le mérite d’introduire une autre dimension, dans leurs conflits à l’écran. Collision réalité / cinéma, qui n’est pas sans intérêt.

Perceval, Karadoc, Bohort, Yvain (Simon Astier), Gauvain sont des semi-imbéciles et servent à réchauffer la salle par leurs facéties le plus souvent bien involontaires.

Des occasionnels sont de vrais professionnels. Ces acteurs, qui ne sont parfois que des « invités » circonstanciels, rajoutent de belles touches de couleurs. Ils laissent éclater leur talent avec sans doute une belle part d’improvisation. Ils rendent par là un bel hommage à la série :  François Rollin (Loth, roi d’Orcanie) et Antoine de Caunes (Dagonet) dans le Livre IV, ainsi que Claire Nadeau (Cryda de Tintagel), Alain Chabat (le duc d’Aquitaine), Géraldine Nakache (la duchesse d’Aquitaine), Christian Clavier (le jurisconsulte), Anouk Grinberg (Anna), Patrick Bouchitey (le pêcheur, père des jumelles), Guy Bedos.

Il y aurait bien entendu bien d’autres choses à dire sur ce très bon travail. Mais autant le découvrir par vous-mêmes.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Kaamelott

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