L’Esprit s’amuse. Avis. Edward Hall contre David Lean, Noël Coward. Leslie Mann nulle. 4/10

Temps de lecture : 3 minutes

Quand on tente une analogie avec le style Noël Coward, ce théâtreux à la « Nous Deux », c’est en général pour se moquer d’une certaine mièvrerie.

Il a pourtant réalisé une belle pièce en 1941, et donc à une époque où on avait fortement besoin de s’évader et de rire. Ce fut un énorme succès qui a justifié qu’on la transpose au cinéma, afin qu’elle soit plus largement diffusée.

Cela a donné L’esprit s’amuse (film, 1945) de David Lean / Noël Coward. Un excellent long métrage, avec Rex Harrison, Constance Cummings et surtout ce pilier Margaret Rutherford, actrice émérite sur lequelle repose toute l’intrigue. Une vieille Anglaise très traditionnelle, y compris dans ses lubies, qui incarne merveilleusement ce médium approximatif, mais sûr de lui.

L’humour vient du fait qu’on est comme les convives de la séance privée de spiritisme, on n’y croit pas du tout et on veut s’amuser, quitte à se moquer en douce.

Et pourtant il nous faut ce sésame para-logique, pour entrer pleinement dans le scénario. A défaut de croire aux fantômes, on doit croire au film. C’est le minimum. Ce constant porte-à-faux du spectateur est on ne peut plus plaisant. On peut conserver tout son scepticisme tout en profitant du spectacle. Le beurre et l’argent du beurre.

Pour maintenir l’attention, il faut additionner des revenants et l’histoire sait bien faire cela, sans tomber dans l’excès.

Ce film est tellement réussi, qu’il laisse des traces. On dit culte, Non ? Ainsi, dans un couple complice, on peut désormais se menacer de revenir en fantôme vert, pour chatouiller les pieds du veuf ou de la veuve qui vous tromperait de manière posthume. On joue encore à cela.

Mais pour arriver à ce merveilleux résultat, il faut un David Lean. Celui de Oliver Twist, Le Pont de la rivière Kwaï, Lawrence d’Arabie, Le Docteur Jivago…

***

Voilà j’ai commencé ma chronique, en ne parlant que de la version 1945 et en laissant ostensiblement tomber celle de 2020. C’est qu’elle ne mérite pas qu’on s’y arrête. Il n’y aurait que des moins à mentionner.

L’esprit s’amuse 2020. Séquences longues, idées courtes. Ce grand classique anglais a été défiguré. Tout l’esprit semble s’être évanoui. Ce qui est un comble puisqu’il s’agit d’Esprit.

L’actrice Leslie Mann qui incarne le fantôme jaloux, venant embêter son ancien mari, m’a toujours agacé. Et là c’est encore pire puisque avec sa prestation dérisoire, cette Américaine contribue à détruire cette œuvre d’art si british. Grosse erreur de casting ! Et puis les esprits moi j’aime les voir vert. Elle est ici bien trop réelle, l’effet waouh ne prend pas.

J’aime bien Judi Dench, mais elle en fait trop (et pas assez) pour effacer Margaret Rutherford en Mme Cecily Arcati.

Dan Stevens en mari tourmenté par deux femmes démons, ne démérite pas. Mais le plus bel homme ne peut donner que ce qu’il a. Et ici sa partition est limitée. Pas sa faute !

***

Un film qui commence par mettre en scène un écrivain en panne devant sa Page Blanche révèle un profond manque d’imagination. Un scénariste qui fait ainsi ne parle que de lui-même et de ses petits problèmes d’inspiration. Pire encore ce coup-là on nous l’a déjà fait 100 fois. On peut pardonner cette facilité à Noël Coward, mais il aurait été salutaire 80 ans après de renouveler ce point, de trouver une autre piste.

Il n’y aucun renouvellement, comme je l’ai vu écrit ici ou là. Il y a un abâtardissement.

***

Par paresse, j’ai regardé presque jusqu’au bout. Mais mal m’en fit. À présent je peux vous donner un bon conseil : ne regardez pas ce film. Et à la place, retrouver la version originale si agréable à voir.

J’en veux à ces pilleurs de tombe, qui détruisent tout ce qu’ils touchent. Je méprise ces profanateurs de monuments du 7ème art. Les critiques de cinéma qui marchent dans ces odieux ripolinages sont bien évidemment des complices et/ou des vendus.

« Je me permets d’intimer l’ordre à certains salisseurs de mémoire qu’ils feraient mieux de fermer leur claque-merde ! » — (Michel AudiardLes Tontons flingueurs)

***

Fuyez les sites pourris, mais néanmoins placés à la tête des pages de recherche Google, et qui commencent (et terminent) ainsi :

« Un écrivain à succès confronté au syndrome de la page blanche invite, avec sa femme, une voyante afin qu’elle l’aide à remédier à son blocage. A la .. »

Ils n’ont rien de plus à dire et veulent vous faire payer pour voir !

https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Esprit_s%27amuse_(film,_2020)

https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27esprit_s%27amuse_(pi%C3%A8ce_de_th%C3%A9%C3%A2tre)

https://fr.wikipedia.org/wiki/L%27esprit_s%27amuse_(film,_1945)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Judi_Dench

Envoi
User Review
0% (0 votes)

Laisser un commentaire