Le roman de 1947 porte un titre autrement intéressant : « On ne tue pas les pauvres types ». Ce qui sous entend qu’on formule et qu’on puisse répondre à la question angoissante suivante : « mais qui sont les pauvres types ? » – Vous et moi ? Je est un autre ?
C’est exprimé par Maigret ainsi : « Pourquoi avoir tué un homme comme lui ? On ne tue pas les pauvres types… »
A l’origine c’est une nouvelle concise. Son adaptation en Maigret voit double met en valeur Bruno Cremer.
Du fait du petit format original, l’intrigue ne se perd pas dans des circonvolutions trop artificielles, comme c’est tellement le cas souvent avec les téléfilms longuets, centrés sur un enquêteur (Maigret, Poirot et bien d’autres). La liste des suspects est forcément plus limitée.
Ce crime est très bizarre. Un expert comptable est abattu chez lui, depuis l’hôtel d’en face, avec une carabine à plomb de fête foraine. Un carton incroyable. Une chance sur 1000 d’arriver dans le cœur, sans être arrêté avant. Le tout à 10-12 mètres. Et puis ce genre de blessure par plomb unique est rarement létale.
La victime, ce Monsieur Temblet, mène une vie parfaitement terne et commune. Au point de lasser son épouse Laure Duthilleul et sa fille Éléonore Bernheim Gosset. Rien ne semble le prédisposer à être assassiné. Personne ne le remarque. Il n’a ni ami, ni ennemi. Sa seule passion consiste à s’occuper d’un petit oiseau en cage. Il est d’une ponctualité rare, se rendant au boulot chaque matin de la semaine et en revenant à heure fixe.
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Vous connaissez sans doute la chanson de Léo Ferré.C’était vraiment un employé modèle Monsieur William
Toujours exact et toujours plein de zèle Monsieur William
…
Monsieur William vous manquez de tenue!
Vous êtes mort dans la treizième avenue.
Moi, je l’ai écouté petit, par hasard. Ce sont les grands qui s’intéressaient à Léo. Mais elle est toujours restée au fond de moi. Comme un sinistre avertissement.
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Eh bien ce Monsieur Temblet n’est pas « le pauvre type », contrairement aux apparences. En fait il a détourné en 4 ans une somme considérable. Mais pour cela, il a fallu s’occuper du vérificateur. Et c’est sans doute là que se trouve un problème, chez ce curieux autre comptable, tout replié sur lui-même, Aladin Reibel. Laissons planer le doute. On ne va pas tout vous dire, tout de même.
La particularité hautement psychologique de ce Tremblet, c’est qu’avant de devenir un cadavre, il est resté modeste et limité, même une fois fortune faite. Il s’est contenté de démissionner tout en faisant croire à sa femme que rien n’avait changé. Il a occupé un foyer bis, strictement identique au premier avec comme seule fantaisie un grand nombre d’oiseaux. Voilà où il a passé son temps. Même une autre femme qui lui rendait visite une fois par semaine, n’avait pas pour lui d’intérêt autre que d’apporter les graine à volatiles. Elle, elle était clairement demandeuse et n’avait pas à rougir de son physique.
Seule la fille du mort s’est rendue compte de la supercherie, qu’il a alors maquillé en gain à loterie.
Et dans le film cette toute jeune femme sait très bien tirer à la carabine à plomb. Elle plaît au neveu virtuel de Bruno Cremer, Alexandre Brasseur. La morale coquine et immanente de ces séries, va quand même l’innocenter, non ?
La femme du défunt semble ” libérée “, juste de quoi la mettre sur la liste des suspects.
Les acteurs sont bons et ils semblent jouir d’une belle liberté de jeu. François Luciani réussit sa réalisation, avec un bel hommage à l’époque et ses décors plutôt fanés et glauques. C’est bien pour cet atmosphère irrespirable qu’on aime les Maigret. C’est tourné dans cette Tchéquie de 2000 où l’on pouvait encore trouver les tristes stigmates de feu le communisme.
- A présent, et je peux l’attester, la République Tchèque a grandement progressé. De nombreux endroits y sont préférables que dans la « vieille » Europe de l’Ouest, dont la France déclinante.
Luciani, certes engagé politiquement, ne semble pas avoir fait une carrière de réalisateur aussi brillante qu’il aurait pu.
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