Pension Vanilos. Intrigue ChatGPT, Agatha Christie, Suchet Poirot. 7/10

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Le scénario de Pension Vanilos a beau être alambiqué à souhait, l’histoire et son traitement sont toujours agréables à regarder. Les jeunes acteurs et bien entendu Poirot / Suchet et sa clique y sont pour beaucoup.

Mais de grâce, n’allez pas crier votre admiration sur les toits, tout bêtement parce que vous avez été berné et que vous n’avez pas trouvé le ou les coupables à temps.

Cette complexité est un « truc » et ne devrait pas rendre Agatha Christie plus finaude à nos yeux. Elle n’est pas la conceptrice de Sherlock ou de Columbo.

Les solutions des crimes tiennent plus de l’intuition que de la vraie déduction. Et surtout le fait que les suspicions soient portés sur tout le monde à tour de rôle, avec des arguments fabriqués au fur et à mesure, fait que l’ensemble est définitivement artificiel.

Par contre Agatha Christie est une fine psychologue qui sait nous rendre les protagonistes intéressants. Même les coupables finissent par avoir un semblant de bons côtés. Et à l’inverse les innocents ont tellement de choses à se reprocher qu’ils deviennent profondément humains. Comme Sisyphe, c’est à dire chacun d’entre nous, ils trimbalent à perpétuité leur fardeau et leur détresse. On compatit. Ah qu’il est dur d’être riche et/ou intelligent !

Cette aventure de Poirot / Suchet ne tient pas plus debout, que bon nombre des autres opus. On ne peut pas avoir, dans cette unité de temps, de lieu et d’action, tant de rebondissements fortuits. Le seul intérêt du procédé est de maintenir éveillé les lecteurs ou les spectateurs.

Une fois encore Agatha Christie met à profit ses souvenirs d’enfance. Les seuls qui restent parfaitement stables quand on vieillit. Pour nous public français, la comptine Hickory Dickory Dock (Nursery rhyme) nous parle bien moins qu’une Une souris verte. Mais pour les Britanniques cela veut dire quelque chose. Et il suffit à Agatha de mettre l’intrigue dans une pension de la rue Hickory pour qu’elle nous fourgue ce thème ravageur.

L’épisode dans notre langue laisse tomber tout cela au profit de Pension Vanilos. Et désormais c’est ce titre qui attire notre respect. Comme quoi un nom n’est que le véhicule d’un contenu. S’appeler Hercule n’est pas synonyme d’une abondante musculature, n’est-ce pas Poirot ?

A noter dans le téléfilm, un rat récurrent sensé symboliser le « mal ». Ce n’est pas du meilleur effet. Cette dose supplémentaire de « pathos » apporté par le réalisateur Andrew Grieve détonne.

Le vol apparaît ici sous tous les avatars possibles. C’est l’exploitation « mécanique » d’une combinatoire qui s’en occupe. On imagine Agatha Christie se creusant la tête pour mettre tout cela dans son roman. Cette algorithmie matricielle embryonnaire serait vite supplantée par ChatGPT de nos jours. Alors il y a de vrais vols, de la supposée kleptomanie, des faux vols pour attirer l’attention, des combines internationales qui sont des vols dans un certain sens etc.

La plupart des étudiants présents traînent à l’hôpital, ou sont amenés à y passer. Voilà de quoi favoriser de nombreuses pistes quand il s’agit de subtiliser une mortelle morphine.

L’inventaire à la Prévert des objets chapardés est assez bien conçu. Notre cerveau est ainsi fait que nous sommes tentés en priorité par l’hypothèse d’un voleur unique. Et puis ces objets sont en soi bien inoffensifs. Le but du jeu est de les hiérarchiser. Mais on n’a pas toutes les cartes en main pour cela. Dommage !

Il n’y a que Poirot qui semble s’alarmer et qui réclame qu’on prévienne la police. Pourtant, objectivement à ce stade, il n’a pas beaucoup d’arguments pour paniquer de la sorte. C’est donc du pipeau.

Et le fait qu’il y ait trois morts, alors qu’il est supposé se préoccuper au plus au point de tout cela, en fait un limier plutôt inefficace. Voilà qui mérite une nouvelle fois d’être dit.

N’y a-t-il pas chez notre serial-killer Agatha Christie, un roman où Poirot ou Marple arrive à éviter tous les meurtres. Ce ne serait pas insensé.

Agatha Christie, comme à son habitude, greffe là dessus, une histoire de filiation cachée. Cela fait partie des « astuces » dont elle ne semble pas pouvoir se passer. Mais elle a bien d’autres tics d’écrivain ; ce qu’on appelle le style. La multiplication miraculeuse des étudiants suspects lui permet de varier les combinaisons à sa guise, mais pas forcément au goût des amateurs de rigueur et de véracité.

Pour attirer Poirot dans une simple histoire de vols chez des gamins, il faut un passe-partout. C’est Miss Felicity Lemon qui se dévoue. On lui invente une sœur qui dirige la pension de famille.

Le faire-valoir de Poirot est à nouveau Philip Jackson, l’inspecteur-chef James Japp. Mais où est donc passé Hugh Fraser, le capitaine Arthur Hastings ?

https://fr.wikipedia.org/wiki/Pension_Vanilos_(t%C3%A9l%C3%A9film)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Pension_Vanilos

https://en.wikipedia.org/wiki/Hickory_Dickory_Dock_(novel)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Sherlock_(s%C3%A9rie_t%C3%A9l%C3%A9vis%C3%A9e)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Columbo

https://fr.wikipedia.org/wiki/Une_souris_verte_(chanson)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Hickory_Dickory_Dock

https://fr.wikipedia.org/wiki/David_Suchet

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