T4, un médecin sous le nazisme. Julius Hallervorden pathologiste, chercheur de cerveaux. 8/10

Temps de lecture : 4 minutes

« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » – Rabelais.

Le Dr Karl Brandt fait partie de ces mulhousiens notoires, qu’on espère bien planquer sous un épais lit de choucroute, ici bas. Et comme on préfère s’en débarrasser, on dit de lui qu’il était allemand, ce qui factuellement vrai à sa naissance en 1904, mais ce qui reste géographiquement discutable. Il est bien Alsacien.

  • On préfère mettre en avant ce bon william-wyler-mulhousien-a-hollywood (dont Ben-Hur),
  • Ou la famille des Marx Brothers qui a émigré aux USA, mais venait de notre cité aussi.
  • Le fameux Dreyfus de l’Affaire éponyme ne peut renier sa naissance dans cette ville.
  • On attribue 150 victimes à ce tueur en série Yvan Keller, un contemporain bien de chez nous, qui s’est défilé en se suicidant avant le procès. Ce serait donc le plus grand tueur en série.
  • A noter le séjour professionnel à Mulhouse de l’anti-nazi Albert Göring qui était le protégé de son grand frère nazi Hermann Göring.

Suite avec un accident de bagnole du Führer en 1934, le Dr Karl Brandt qui vient à la rescousse, séduit Adolf Hitler, au point qu’il en fait pendant un bon moment, son médecin personnel attitré. Ce toubib nazi n’était pas là par hasard. Attendait-il son heure ?

Mais « T4, un médecin sous le nazisme » ne traite pas de Karl Brandt (médecin) directement. C’est à dire que le documentaire ne s’attaque pas à la tête qui a mis en place l’élimination des « anormaux », mais à un des officiants bien coupables et qui était directement sur le terrain, si j’ose dire. La relation pyramidale où trône Brandt est bien soulignée. Il est vraiment le chef du système de santé et l’organisateur des horreurs médicales. Il sera en poste jusqu’au bout. Par contre c’est Theodor Morell, le docteur piquouse, qui finira auprès d’Hitler ; lui procurant autant de drogue que ce dictateur abruti souhaite.

Brandt sera pendu pour crime contre l’humanité (1947), crime de guerre (1947), meurtre… alors que le neurologue Julius Hallervorden, qui est au centre du documentaire, s’en sortira très bien et continuera sa carrière par la suite.

Ce n’est que très tardivement, grâce à la redécouverte du carnet de rendez-vous du dangereux Dr Irmfried Eberl que l’on pourra démontrer l’implication directe d’Hallervorden dans la sélection des victimes et leur meurtre de sang froid.

Le « pauvre » savant avait besoin de faire l’examen anatomo-pathologique du « plus possible » de cervelles malades. Ce ne fut pas le seul pathologiste dans son cas, on pense au Camp de concentration de Natzweiler-Struthof et la collusion avec le secteur anatomie de l’université de Strasbourg, pour enrichir la collection_de_squelettes_juifs_du_professeur_Hirt, mais pas seulement. Et cela ne fait pas la fierté de mon ex-métier.

  • Une profession médicale très intéressante mais qui conduit sournoisement à l’abstraction, puisque nous ne sommes pas en face de patients avec leurs problèmes mais d’images désincarnées au microscope. Un cancer n’étant plus alors une souffrance potentielle mais de gratifiantes images, lorsqu’elles sont bien caractérisées.

Ce gros malin obtiendra même la reconnaissance de l’Allemagne dénazifiée, avec ce titre ronflant de Commandeur de l’ordre du Mérite de la République fédérale d’Allemagne (1956) – Pourtant dès 1953 sa participation à un congrès était compromise en raison de la résurgence de profondes suspicions.

Il se justifiait en disant que c’était un crime de ne pas se servir de ce matériel pour sa mission scientifique qui profiterait à l’humanité (au Reich), une fois les victimes assassinées. Une logique réfrigérante. Mais il est clair qu’il a été bien plus loin en sélectionnant les cerveaux sur le vivant.

C’était pourtant un vrai défricheur. Il a identifié ce qu’on a appelé le syndrome de Hallervorden-Spatz qui fut rebaptisé en neurodégénerescence associée à la pantothénate kinase, un titre plus présentable.

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Le reportage montre très bien la montée en puissance d’anciennes théories eugénistes visant l’amélioration de la race humaine, comme on le faisait pour les races animales. Ces élucubrations ont été captées et amplifiées par les nazis, avec un terrible final criminel, qui avait aussi pour vocation de libérer des lits pour le soldats blessés. En cours de route, il y a eu une sorte de freinage brutal à ces monstruosités, sans doute en raison d’inquiétudes de la population et de sursauts de l’église.

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On voit l’ordre signé par Hitler pour le déclenchement de cette procédure dite T4. Brandt et un complice étant chargés nommément de mettre cela en « musique ».

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Retour aux sources . A noter qu’un des premiers lieux de tuerie T4 fut celui du Centre_nazi_de_Grafeneck, à 230 km de Mulhouse.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_Brandt_(m%C3%A9decin)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Julius_Hallervorden

https://fr.wikipedia.org/wiki/Camp_de_concentration_de_Natzweiler-Struthof

https://fr.wikipedia.org/wiki/Collection_de_squelettes_juifs_du_professeur_Hirt

https://fr.wikipedia.org/wiki/Irmfried_Eberl

https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_d%27extermination_nazi_de_Grafeneck

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