Ted. Avis film. MacFarlane. Mark Wahlberg, Mila Kunis. 8/10

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Un film vulgaire, pas vulgaire du tout.
Le scénario habile de 2012, détourne pas mal de concepts bien plantés dans les consciences américaines. Mais il le fait de manière originale et intelligente.

  • Cela plaît à plusieurs générations. J’ai vu cela avec mes fils.

Ted est un ours en peluche magique. Il a les proportion caractéristiques de l’ourson, dont la tête immense par rapport au corps. Mais son jeu d’expressions est celui d’un être mûr.

Au premier degré, il correspond à cette mythologie du Teddy bear, que l’on doit à (Ted) Theodore Roosevelt, le président des USA, au début du vingtième siècle. On connaît tous l’histoire. Le « jouet » rassurant, est donc dans un imaginaire collectif très répandu et passablement sérieux.

Et c’est donc dans le film, l’ami le plus proche de Mark Wahlberg, voire le seul à ses 8 ans. Il l’est encore à ses 35 ans. Ce qui permet une approche para-psychanalytique moqueuse, sur l’attachement persistant à un tel objet fétiche. Jetez enfin l’ours et vous passerez au cap suivant de développement.

Sur ce même plan, l’ourson-jouet à la personnalité écrasante, est en concurrence avec la petite amie de Mark, la redoutable actrice Mila Kunis. Cette actrice américaine talentueuse, mais touchée par l’hyperactivité, est issue d’une famille juive ukrainienne. Cette hétérochrome vit avec Ashton Kutcher.

  • Le long-métrage nous procure une intéressante « dépigmentation » de cette idéologie Woke, qui s’intéresse en priorité aux « noirs » et autres « victimes » colorées. Les protagonistes se posant la question de savoir si on a encore le droit de dire de quelqu’un qu’il est juif. La question de la judaïté affichée est l’occasion d’une belle joute verbale. J’avais moi-même été contaminé, ne sachant plus trop, si signaler une des origines de l’actrice était licite ou non. C’est dire l’épaisseur de la chappe mentale qui nous surplombe désormais.

L’immature Wahlberg est sollicité par sa belle, pour qu’il entre enfin dans l’ère adulte. Une catégorie qui correspond à des critères classiques très déterminés, voire consensuels, au sein de la société américaine.

Ce concept vorace, nécessite tout d’abord d’abandonner ses béquilles d’enfant (l’ourson en particulier). Ce qui se comprend. Mais surtout, il contraint à vouer un culte absolu et monogamique à sa future épouse.

L’affaire amoureuse doit obligatoirement se terminer par un beau mariage. Juste après le rituel de la bague, donnée à genou. On n’évite pas non plus l’obligation de prendre à témoin de son amour, devant tout un public (ici celui de Norah Jones ). Un petit pas pour l’homme, mais un grand pas vers l’irréversibilité. Bien sûr, c’est du cinéma. L’affaire se combine à un chemin de croix avec ses multiples obstacles ; appelés rebondissements au cinéma.

  • Dans la vraie vie, c’est souvent un banal coup de tête plus ou moins inconsidéré qui ficelle les époux. Un déterminisme qui tient le plus souvent à notre exigeante nature hormonale.

La consécration « publique » finale, survient après une longue lutte, destinée à mettre à bas les velléités « coupables » de l’esprit individualiste du mâle. Il faut privilégier la reproduction. On doit tuer le grand enfant mais aussi la passion animale, qui sont rivés au plus profond de la masculinité toxique. On se doit « d’avancer ». L’union est consacrée par ces nombreux invités, qui représentent l’édifice en béton incassable de l’équilibre social.

  • Avec ce package là, on n’est pas tellement dans la dérision. C’est juste le canevas éculé, politiquement correct, qu’on nous ressort dans tous les films dits « romantiques ». Il ne faut pas trop en demander. MacFarlane s’en sort quand même par un double salto arrière avec une vrille ; il fera bénir cette union par Flash Gordon en personne. Ce qui relativise pas mal.

Heureusement le film est aussi sauvé par le comportement « adulte », quoique déviant, de la grosse bête à poils synthétiques. Ce gaillard politiquement incorrect, est bien dans sa tête et mal dans sa peau quand il s’agit de porter la cravate pour obtenir un emploi subalterne.

Cette entité gorgée de kapok a quelque chose du Jiminy Cricket inversé. La bonne/mauvaise conscience de Mark fume des joints sans relâche, mais guide son ami. Il se livre à des dépravations avec des créatures de rêve. Par rêve, j’entends le rêve américain, c’est à dire grosso modo une sérieuse attirance pour des putes toujours consentantes ; soit les antipodes de la mégère mariée au long cours.

Le plus fort c’est qu’il satisfait ces donzelles sans avoir de pénis. Une contradiction apparente soulevée par le principal intéressé. Joli coup d’humour absurde !

Lui aussi sera sommé de progresser. Il prendra un sinistre appartement, où “il n’y a pas eu beaucoup d’assassinats”.

Les choses se gâtent pour les deux “garçons”, quand l’une des “girls” défèque sur le tapis de Mila Kunis. Il y a des « milestones » comme cela qu’on a du mal à dépasser ; un jugement simple, sans coprophobie, ni coprophilie.

Les dialogues sont hilarants. Cela pétille d’intelligence. Les sketches sont nombreux et on ne s’ennuie jamais. Seth MacFarlane, réalisateur, co-scénariste et voix américaine de Ted, a fait un boulot considérable. La voix française n’est pas mal non plus.

Ce créateur associé de American Dad! sait comment stipendier les valeurs traditionnelles. Comme pour ce fétichisme, assumé par Joel McHale, d’une couille nickelée de sportif, assimilée à une oeuvre d’art.

Seth MacFarlane a su utiliser à merveille les principaux acteurs. Il a même convoqué des guests-stars de premier plan pour de courtes apparitions.

  • Norah Jones qui joue son propre rôle, avec charme et intelligence.
  • Sam J. Jones qui fait de même, en interprétant un Flash Gordon (1980) vieilli, sur le retour. De l’auto-dérision bien assumée, surtout quand il combat, sous poudre blanche, un voisin qu’il confond avec son ennemi l’empereur Ming (Robert Wu qui remplace ici le Max von Sydow des débuts). A part cette addiction coupable, que c’est bien vu !
  • Ryan Reynolds joue un tout petit rôle d’homosexuel décomplexé. On dirait que la production cherche à respecter des quotas obligatoires des nouveaux Oscar, mais en fait c’est juste de l’humour inversé.

Pour corser la situation et faire un sérieux porte-à-faux comique, MacFarlane met en scène Giovanni Ribisi en grand dadais malsain qui kidnappe Ted, à l’aide de son fils. Une parodie de film d’épouvante parfaitement menée.

Contacté par portable, Mark s’empresse d’appeler la police pour ce « kidnapping d’ours en peluche ». On imagine que cet appel ne donnera pas grand-chose. Mais comme le comique à triple détente est parfaitement maîtrisé, on verra la scène classique d’arrivée tonitruante des véhicules des représentants de l’ordre. En troisième instance, le tribunal ne poursuivra quand même pas le kidnappeur de peluche, car « ce n’est pas réaliste ». Il y a plein de gags filés, discrets mais efficaces, comme celui-ci.

L’animation de Ted, telle qu’elle s’intègre à la vie d’acteurs réels, est très bien maîtrisée. On est loin des Space Jam (1996) et autres.

Un film vulgaire, pas vulgaire du tout ? Oui car la vulgarité, c’est une attitude qui tient aux défauts de l’être. Cela n’est pas réductible à l’utilisation de mots crus et « sales ». Merde alors, vous le savez puisque vous êtes un fidèle lecteur de LibreCritique !

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ted_(film)Le bon dieu du box office a été reconnaissant au décuple ! 549.4 millions de $ engrangé pour un budget de 50–65 millions.

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https://fr.wikipedia.org/wiki/Seth_MacFarlane

https://en.wikipedia.org/wiki/Ted_(franchise)

https://en.wikipedia.org/wiki/Ted_(film)

https://fr.wikipedia.org/wiki/American_Dad!

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ours_en_peluche

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jiminy_Cricket

https://fr.wikipedia.org/wiki/Mila_Kunis. Cette actrice américaine talentueuse, mais touchée par l’hyperactivité, est issue d’une famille juive ukrainienne. Cette hétérochrome vit avec Ashton Kutcher.

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