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C’est un concert, dont on vous dira dans tous les commentaires, que ce fut leur dernier qui a été filmé. Mais je n’aime pas ces présentations mortuaires. C’est facile de faire du mauvais pathos après coup. Les mêmes prétendront qu’on peut y voir des signes annonciateurs de la destinée fatale de Jim Morrison et toutes ses sortes de bêtises. Le concert termine par The End, mais on ne va pas en faire tout un plat.

Ceci est un “second look”, un visionnage précédent ayant donné ceci : The Doors. Isle of Wight Festival 1970. 8/10

Dans le registre des prémonitions, il se trouve que juste avant de visionner ce concert, j’ai retrouvé, sans même les cherchez, des photos que j’avais pris de jeunes hippies devant la tombe de Morrison au cimetière du Père-Lachaise. On peut tout faire dire à de simples hasards.

De ne pas avoir été au concert de 1970 sur l’île a été un de mes grands regrets. Autant pour les artistes qui s’y sont produits que pour la convivialité. Il faut dire qu’à cette époque, on allait d’un côté à l’autre de la planète, juste par la confiance qu’on portait au bouche à oreille. J’ai voyagé loin comme cela. Et ce happening de l’île de Wight paraissait un must, tant le message porteur s’amplifiait.

Ce Isle Of Wight Festival a été en effet au moins égal à Woodstock, même si les jeunes générations n’en ont pas conscience. Un immense succès, et par le nombre, 700.000 personnes et par la prestation d’illustres intervenants : Jimi Hendrix, The Doors, The Who, Free, Chicago, Leonard Cohen, Gilberto Gil, Procol Harum, Supertramp, Emerson, Lake and Palmer, Miles Davis, Joni Mitchell, Ten Years After, Joan Baez et Jethro Tull. Parmi ces derniers il ne m’a été permis de voir en vrai que The Who et Jethro Tull.

A ce Festival de l’île de Wight, le groupe the Doors a interprété de nombreux morceaux célèbres alors, comme “When the Music’s Over“, “Break On Through (To the Other Side)“, “Back Door Man“, “Light My Fire” et “The End“…

Il a quelque chose de fascinant dans cette musique, une sorte de joie-triste, à la fois contenue et libérée. Ray Manzarek parle de « fureur contrôlée ». Ce double-bind en forme de « gentle-dream » et « I want to kill you », est théatralisée par cette musique profonde.

C’est comme si the Doors nous transmettaient leurs dernières impressions juste après un très long voyage, « so far and so near », sans doute au-delà des Portes de la perception. Je retrouve cela aussi dans des musiques plus lentes, voire un brin mélancolique, dans Nursery Cryme de Genesis (1971), ou Hot Rats de Frank Zappa (1969), pour ne citer que les mêmes années.

On a cela dans des « trips » encore plus étranges, comme en littérature, dans Démons et Merveilles (Lovecraft), Le retour d’un « pays » perdu et indicible, avec apaisement, nostalgie et craintes à la fois. Il ne faut pas y voir une vision d’un au-delà, mais au contraire la perception de racines très anciennes et très profondes qui sont en nous.

Cette musique envoûtante a l’air de jaillir d’une source toute neuve. Pourtant les morceaux sont exécutés au millimètres près, et donc on ne peut dire qu’ils sont spontanés. Mais ces artistes sont tellement habités et synergiques que d’infimes variations nous font revivre les morceaux comme au premier jour.

Le concert semble filmé à la bougie comme pour Barry Lyndon. Mais là encore, on vous expliquera la maldonne du groupe qui a omis d’apporter son éclairage. Mais finalement, on s’accommode de ce qui pourrait être un handicap. Au contraire, la musique n’en est que plus importante. D’ailleurs, en son temps, on écoutait sans avoir d’images, autres que celle de la pochette du disque.

Ayant visionné récemment le concert WHO Hyde Park de 2015, je peux affirmer que l’image aussi sophistiquée soit elle, n’est rien par rapport à la prestation musicale et l’ingénierie du son.

Suite sur : Maladies de Jim Morrison. Poésie et dépression. Borderline. Alcool et drogues. Suicide.