Avis film, Bonjour, Ozu. Philosophie. Communication. Langage. 8/10

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Analyse en 4 parties chaînées :

Avis film, Bonjour, Ozu. Philosophie. Communication. Langage. (ICI)

Avis film, Bonjour, Ozu. Télévision progrès et tradition.

Avis film, Bonjour, Ozu. Médisance. Intonations, différence sexuelle.

Avis film, Bonjour, Ozu. Enfants qui pètent. Communication non verbale.

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Assurément le grand visionnaire semi-moderne, semi-traditionaliste Yasujirō Ozu, n’a pas anticipé l’avènement de la grande encyclopédie Google/Internet. Le mot « Bonjour » génère aujourd’hui 583 000 000 résultats… et le Bonjour (film, 1959) est bien planqué là dedans.

Cet excellent film est généralement très mal compris. Il n’a rejoint la France qu’en 1992, et encore dans des salles obscures et reculées !

Il commence comme d’habitude par un plan fixe qui expose un endroit reculé d’une communauté urbaine. C’est singulièrement anodin. A part qu’il affine son introduction dans une sorte de lucarne laissée entre les maisons. La caméra se rapproche. On y voit défiler des enfants et quelques adultes.

Il règne une belle innocence. C’est la banalité du bien. On dirait du Tati.

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Ce film n’est pas un travail sur le conflit des générations, comme j’ai pu le lire ici ou là. Ça c’est une vision occidentale de baby-boomer, ou tout est rapport de force et prise de pouvoir.

Ce que Ozu nous donne à voir et à entendre, c’est un long-métrage sur la communication et le langage. D’ailleurs le titre « simple comme bonjour » devrait nous mettre sur la voie.

Ce langage futile, ses paroles en l’air, ont une grande importance. Car ils adoucissent les mœurs comme une belle musique. Qu’importe les paroles !

Une fois passé le stade du babillage, les enfants qui sont devenus très « premier degré », cherchent à tout prix une signification simple et univoque, dans les termes des adultes. Comme le montre leur sempiternelles cascades infinies de « pourquoi ». Ils ne savent pas encore la valeur essentielle du blabla répétitif des grands sur le temps qui passe, le temps qu’il fait et toutes ces apparentes âneries. Ce qui fait que ce relatif retour au babillage des grands, les irrite.

On ne s’attend pas à autant de clarté chez les tout-petits. Eux manient le « Il faut qu’on parle ! », c’est à dire qu’on leur donne un contenu le plus pauvre possible en ambiguïtés. Chez eux quasiment tout doit être rhétorique ou persuasif.

Vous noterez que dans le final, la valorisation de ce couple naissant, par des «propos en l’air ». Ceux qui auraient le plus à se dire, sont ceux qui vont faire leurs gammes avec des paroles les plus légères. Ce faisant, ils obéissent à un rite immémorial, qui consiste à voir s’ils peuvent se synchroniser, déjà sur les choses simples. En évoquant le temps qu’il fait et l’aspect des nuages, ils avancent à grand pas. Tous les spécialistes vous le diront, dans l’approche amoureuse, le « texte » ne compte pas. Surtout si on prend soin d’éviter tous les sujets sérieux. Et puis l’acte de « prendre la parole » est un acte existentiel. Je parle, donc vis à vous, je suis.

Si cette parole là ne transmet pas vraiment de message direct, il indique quand même des indications précieuses sur son interlocuteur. L’intonation, le style et les expressions, sont déjà de précieux indices. Et puis cette verbosité de l’insignifiant, n’est pas générative de malentendus, contrairement à l’embarrassante polysémie de nombreux discours.

Il est particulièrement intéressant de voir ces films en VO de ce fait. Nous autres « touristes » de cette sociologie, nous pouvons y apprendre beaucoup. Le ton y est très informatif. La parole est alors un « style » qui aide à définir une personne.

« Il y a une signification langagière du langage qui accomplit la médiation entre mon intention encore muette et les mots, de telle sorte que mes paroles me surprennent moi-même, et m’enseignent ma pensée. Les signes organisés ont leur sens immanent, qui ne relève pas du « je pense », mais du « je peux ». ( Signes – Maurice Merleau-Ponty -)

Analyse en 4 parties chaînées :

Avis film, Bonjour, Ozu. Philosophie. Communication. Langage. (ICI)

Avis film, Bonjour, Ozu. Télévision progrès et tradition.

Avis film, Bonjour, Ozu. Médisance. Intonations, différence sexuelle.

Avis film, Bonjour, Ozu. Enfants qui pètent. Communication non verbale.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Bonjour_(film,_1959)

https://www.dygest.co/barbara-cassin/quand-dire-c’est-vraiment-faire

https://en.wikipedia.org/wiki/Cheap_talk

https://fr.wikipedia.org/wiki/Carnage_(film,_2011)

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