Avis Ricky Gervais, Armageddon sociétal, psychologique, sociologique, politique et philosophique. 8/10

Temps de lecture : 4 minutes

Enfin un amuseur vraiment “drôle” et qui sort du lot. Lors de l’épisode précédent, je vous ai parlé des circonstances de cette découverte jouissive. Mais j’ai aussi souligné la complexité de recommander un spectacle à ses proches.

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Concepts universels, traduction et diffusion de la sainte parole.

Une belle découverte que ce Ricky Gervais. Un vrai “king” de l’humour. Pour l’apprécier pleinement, il vaut mieux connaître l’anglais. Mais comme l’essentiel n’est pas lié à des jeux de mots, mais à des idées, cela passe très bien en V.O. pour la “musique” et en sous-titrage non destructeur pour le message.

Point important et qui pourrait intéresser des artistes francophones : les pensées qu’il développe sont suffisamment universelles, pour qu’elles puissent être exprimées directement dans notre langue. Avis aux amateurs (*)

Start-up et Stand-up.

Ricky Gervais est ce qu’on appelle un professionnel du Stand-up. Un exercice dans lequel excellent les anglo-saxons. Mais trop de ces baladins exotiques, sont trop liés aux jeux sur les mots. La magie s’effondre lors de la traduction. Même en forçant sur les faux rires. D’où de sérieux doutes chez nous, pour cet exercice. Jusqu’à présent le Stand-up n’est pas vraiment notre “cup of tea”.

Il faut dire aussi que nos artistes ne sont pas tous des analystes, philosophes et sociologues. Et plusieurs d’entre eux se reposent sur des bases humoristiques identiques et lourdingues qui finissent par tuer le métier ; quand ils ne se contentent pas d’imiter le premier Benny Hill venu (Roland Magdane ?).

Les plus courageux d’entre nous finissent par se lasser. That is the problem.

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De qui se moque-t-on ?

Gervais est un pompier-pyromane ou plutôt un pyromane-pompier. Il passe la moitié du spectacle à mettre le feu, au point “d’allumer” toutes les ligues de vertu, puis il tente de l’éteindre. Mais “dans nos âmes, il brûle encore“.

Pour nous désinhiber, il cherche à nous expliquer pourquoi nous avons le droit de rire jusqu’aux limites et même au delà. Ce qui en soit serait anodin. Mais il s’agit ici d’une extension rarement atteinte du fameux « rire de tout »… avec presque tout le monde.

Pour profiter des questions/réponses existentielles qu’il propose, on doit être en mesure de supporter des blagues sur le handicap, les nains, l’homosexualité et son contraire (voir plus loin), le féminisme et l’antiféminisme, la pédophilie, l’exploitation des enfants, la maladie terminale, la religion, le racisme et surtout l’antiracisme, et bien sûr le sacro-saint wokisme. Il est en terrain miné et il le sait. Ce Giordano Bruno risque d’avoir la langue arrachée et de terminer sur le bûcher. Des furies et des ayatollahs sont en embuscade.

Son show, vu superficiellement, frise l’indécence morale. Son maintien en dépit des critiques haineuses, tient donc de l’exploit. Les Rebatet vociférants, avec leurs appels implicites au meurtre, ont changé de camp. Ils crient au scandale. En tant que rescapés de l’idéologie libertaire du siècle des lumières, on se doit d’encourager ces spectacles.

La recette du bouillon primordial est simple, si l’on sait pointer du doigt ce qui ne va vraiment pas. Mais il faut être fin, intelligent, prudent et audacieux et avoir de l’humour pour mettre cette critique en œuvre. Autant d’ingrédients pas toujours faciles à trouver, dans ce milieu singulièrement figé. Je rajouterais qu’il faut être dépourvu de haine. Là encore, une qualité qui tend à disparaître dans les satires et autres fantaisies. Le canalplussisme ayant fait des dégâts.

Alors en définitive, de qui se moque-t-on ?

Pourquoi n’oserions-nous pas dire, comme lui, qu’on peut parfois être tenté de cracher au visage de cette pénible cette petite vieille, bien trop proche de nous ? Vous pouvez décliner cela dans de nombreux registres. D’autres provocations symboliques consistent à vouloir participer à un lancer de nain, à se réjouir du spectacle d’immigrés en détresse près de la plage, à se libérez en insultant un enfant handicapé fortement et sur le point de mourir…

Le faire serait une faute, mais de le mettre en mots est de l’ordre du fantasme véniel et cathartique, ou de la philosophie par antithèse. En décadenassant ce pulsionnel bridé en nous-mêmes, on en révèle bien l’absurdité. Ce n’est aucunement un encouragement à la violence stupide. Et nous, les libres penseurs, on n’a pas demandé à renverser le Capitole ou à déboulonner des statues.

La « thérapeutique » proposée par Gervais est tout le contraire.Voilà les racines de l’humour.

Charlie Chaplin ne faisait pas autre chose, en tirant le nez d’un policier. Tordre le nez de la doxa, c’est précisément ce qu’il faut faire au wokisme. Il en est de même quand Mister Bean renverse la reine. Qui peut être assez stupide pour penser qu’il nous demande de faire pareil ?

Ce sont ces crimes de lèse-majesté virtuels, qui nous enchantent. Pourquoi devrions-nous nous en priver ? Et quels sont ces imbéciles qui se permettent de nous condamner juste pour ces idées non suivies d’actes, qui sont en nous ?

Ce ne sont que des « images », des métaphores. Il n’y a même pas une « intention » et encore moins une « incitation » à faire comme lui. Le voir suffit à désamorcer nos envies profondes. Et ça les woke ne l’ont jamais compris.

Gervais nous dit de nous réveiller « wake, woke, woken », mais en rétablissant le bon sens du verbe.

Pour nous, le rire est le remède « politique » le moins dangereux, le moins coûteux, le plus efficace.

Qui oserait penser qu’on ressorte du spectacle totalement antisémite, pédophile, avec le mépris du handicap et qu’on voudrait désormais à tout prix polluer davantage la planète ? Blaguer sur les malheurs du monde ne fait pas de nous de mauvaises personnes. Decrispez-vous !

*** notes de bas de page ***

  • (*) Le show mérite même qu’un comique français malin s’en empare et en fasse un spectacle “traduit” fidèlement, réplique à réplique. Ricky devrait proposer des franchises. Avec une once de talent (28,349 g), le goût de la chose et un minimum de sueur pour animer les textes, cela marcherait à tous les coups. Il y a tel contenu à exploiter ! Et le public d’ici est prêt à accepter cela. Conjonction des astres à ne pas louper !
  • Il vaudrait quand même mieux qu’un candidat français se dépêche, car l’attente est importante et tôt ou tard cela se fera. J’aurais 30 ans de moins, j’y serais allé (hum). Restez quand même prudents, chers candidats. Le procédé de copie pure et simple, n’a pas tellement marché avec Wheeler Dealers France. Une bonne partie de la subtilité et de la bonhommie de Mike Brewer n’étant pas si évidente à exporter que cela.

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Etude en quatre chapitres (vous êtes au deuxième ici)

  1. ricky-gervais-critique-et-problemes-circonstanciels-existentiels-armageddon-de-lanalyse-anti-woke-7-10/
  2. ricky-gervais-armageddon-societal-psychologique-sociologique-politique-et-philosophique-8-10/ (vous êtes ici)
  3. armageddon-ricky-gervais-gags-provocateurs-et-rire-intelligent-8-10/
  4. ricky-gervais-notre-sauveur-armageddon-quel-public-rire-revolutionnaire-7-10-avis/

https://www.cnews.fr/culture/2023-12-22/ricky-gervais-une-petition-exige-la-censure-de-son-spectacle-apres-une-blague-sur

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ricky_Gervais et Jane ci-dessous :

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