Crime du Golf. Suchet serre les fesses. Hastings amoureux. Intrigue torturée. 7/10

Temps de lecture : 4 minutes

Chacun a son Hercule Poirot et en ce qui me concerne, j’ai un faible pour David Suchet. Ce comédien britannique a déjà un long passé sur les planches et à l’écran, derrière lui, quand il s’empare du rôle de Poirot à la télévision (1989-2013).

Cet acteur est un converti très chrétien, quasi un prosélyte maintenant. Et dans cette double exigence morale et professionnelle qui accompagne le vécu du personnage, on sent qu’il s’est donné bien du mal pour parfaire sa prestation. D’ailleurs il en parle ici ou là. Comme pour cette trivialité consistant à se coincer quelque chose dans la raie de fesses, pour se contraindre à la démarche coincée qui est le propre de notre Hercule.

Ce téléfilm, je l’ai vu déjà de multiples fois. Et je le reverrai encore des dizaines de fois dans ma vie. Mais jamais, au grand jamais, je ne me souviendrai de tous les rebondissements, tant ils semblent avoir été amassés à la hâte. La mémoire est également défaillante quand il s’agit de cette alambiquée solution finale.

Voyons un peu les ingrédients de ce crime du golf :

  • Un faux mort, deux vrais cadavres.
  • Deux familles intriquées qui habitent côte à côte dans des villas de Deauville.
  • Coupable idéal, faux coupables, vraie coupable.
  • Des amoureuses des uns et des autres.
  • Des amoureux qui ne sont pas ceux que l’on croit.
  • Des amours inassouvies et vengeresses.
  • Des couples improbables, une carpe et un lapin, une chanteuse de cabaret et un vieux garçon.
  • Et une amoureuse au final d’un certain capitaine – ni Dreyfus, ni Haddock… là je vous aide.
  • Poirot entremetteur. Est-ce possible ?
  • Un hôtel du golf qui n’est pas là sous son vrai nom.
  • Des manteaux trop courts et trop longs.
  • Deux poignards quasi identiques qui se révèlent être au nombre de trois.
  • Une collision du passé et du présent qui compromet l’avenir.
  • Tricheurs de jadis, innocents d’aujourd’hui.
  • Un mobile financier trivial mais qui nécessite un coup de billard à multiples bandes.
  • Un Hastings qui peut en cacher un autre… il en profitera pour filer en Amérique du sud un bon moment.
  • Où est passé l’aspirine ?

Le déroulé est pas mal torturé et torturant. Il faut cela dans les romans de gare.

Mais il y a-t-il dans la vraie vie des meurtres qui comportent tant d’enchevêtrements circonstanciels ? La manière de découvrir l’assassin est-elle crédible ? Ces deux questions majeures sont posées ici : poirot-joue-le-jeu-film-avis-david-suchet

Ce sujet de la mémoire chamboulée par l’agitation neuronale que Mme Agatha Christie a insufflé à Hercule Poirot m’a déjà titillé plusieurs fois. J’ai tenté de résoudre cette énigme dans le lien suivant : Qui-est-le-coupable-dans-agatha-christie-aucun-souvenir-pourquoi ?

Mais c’est comme cela, je m’y suis fait maintenant. C’est l’occasion de revoir encore et encore ces épisodes, en ayant à chaque fois quasiment la même fraîche innocence. Un peu comme ces belles musiques qu’on écoute et réécoute parfois tous les jours. Une fois lassé, on les abandonne pendant de longues périodes. Mais on revient toujours.

D’ailleurs les conclusions chez Agatha Christie n’ont pas tant d’importance que cela dans l’histoire. On laisse le fin analyste faire le travail de recollage pour nous. Et puis il y a la magie de la réunion décisive. Un peu comme le banquet d’Astérix, il ne faut pas le louper. C’est un « must » comme disent les anglo-saxons.

Au risque de vous choquer, j’affirme que notre vénérable écrivaine est plus une bonne psychologue et une redoutable façonnière de la littérature-teasing, plutôt qu’une authentique « maîtresse du suspense ». On peur faire le même procès à Alfred Hitchcock, dont le titre de « maître du suspense » est grandement exagéré.

***

Dans cet opus, privilégions donc l’attendrissant pari de Poirot, afin de gagner l’emblématique pipe du Commissaire Giraud. Ce dernier, très « Français » dans sa suffisance, étant à la fois Maigret et Jacques Clouseau. Deux manières de séduire avec ce petit supplément d’âme lié à une douce moquerie.

A noter aussi l’amour confiscatoire du Capitaine Arthur Hastings pour Bella Duveen. Cette phase apparemment frivole sera en fait déterminante. Elle va faire qu’on sera privé de la présence du faire-valoir sympathique, notre alter égo de spectateur n’ayant pas tout compris, pendant plusieurs épisodes. Lui est sa belle étant en Amérique du sud.

Mais ce qui compte encore plus c’est le show de David Suchet en Hercule Poirot avec la voix caractéristique de Roger Carel. Il y a de la tenue, de la rigueur, un brin d’auto-dérision, quelques défauts judicieux, et un « je ne sais quoi » qui force le respect.

Accessoirement on peut aimer aussi l’hôtel du golf, qui n’est autre que le Normandy (Barrière).

  • J’ai eu la chance de séjourner dans ce 5 étoiles. Des lieux où l’on s’attend à rencontrer des célébrités. Mais Poirot n’y était pas. D’ailleurs ces cadres répétitifs finissent par être tristes. Du pareil au même d’une ville à l’autre. Je déteste tout particulièrement ces rez-de-chaussée publicitaire, qui compte faire de petits profits avec ces vitrines de grandes marques. On ne va pas tarder à se vautrer dans l’atmosphère « congés payés » si on continue sur cette mauvaise pente.

https://fr.wikipedia.org/wiki/David_Suchet

https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Crime_du_golf

https://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Crime_du_golf_(t%C3%A9l%C3%A9film)

https://fr.wikipedia.org/wiki/Commissaire_Maigret

https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Clouseau

Envoi
User Review
0% (0 votes)

Laisser un commentaire